Des parlementaires russes ont dénoncé vendredi des tentatives d'ingérence étrangère dans la campagne électorale en Russie à deux mois de la présidentielle, invoquant notamment des publications « partiales » dans les médias étrangers.

« Nous avons déjà observé des tentatives d'ingérence étrangère et nous en attendons d'autres », assure à l'AFP le sénateur Andreï Klimov, qui dirige la commission pour la défense de la souveraineté de la Russie au Conseil de la Fédération, la chambre haute du parlement russe.

À l'approche de l'élection présidentielle du 18 mars, dont le président Vladimir Poutine est le grand favori, ces tentatives ont lieu « de manière massive et deviennent systématiques », déplore-t-il, faisant écho aux préoccupations exprimées à haute voix ces derniers mois par de nombreux députés et sénateurs russes.

Chaque fois que la Russie a organisé des élections après la chute de l'URSS en 1991, « les étrangers ont essayé de s'ingérer [dans nos affaires] », affirme M. Klimov.

Pour lui, « les moyens utilisés sont différents, mais l'objectif est simple : changer la situation politique en Russie, voire le régime ».

« Dix axes d'ingérence dans les affaires de la Russie ont été détectés et prouvés à ce jour » par sa commission, allant « des actions via les "soi-disant ONG" à une politisation inacceptable du sport », poursuit-il.

Ces déclarations interviennent à un moment où les relations entre la Russie et l'Occident sont au plus bas depuis la fin de la Guerre froide, notamment en raison de la crise ukrainienne et des accusations d'ingérence russe dans la présidentielle américaine.

Engluée dans un vaste scandale de dopage, la Russie a également été suspendue des Jeux de 2018 par le Comité international olympique (CIO). Le président Vladimir Poutine a suggéré que les accusations de dopage institutionnalisé avaient été orchestrées par les États-Unis pour nuire au déroulement de la présidentielle russe.

« Mensonges impudents »

Pour sa part, le vice-président de la Douma, la chambre basse du parlement, Piotr Tolstoï, dénonce l'« héroïsation de l'opposition marginale russe dans les médias occidentaux », les accusant de présenter une image « partiale » et « diffamatoire » de la situation en Russie.

« Bien sûr, cela influence l'attitude générale envers l'élection si on commence à comparer le blogueur Navalny au leader d'un parti représenté au parlement, comme le fait dans la presse occidentale », a-t-il dit à l'AFP.

Le charismatique blogueur anticorruption de 41 ans, Alexeï Navalny, considéré comme l'opposant numéro un au Kremlin, a appelé ses partisans à manifester dimanche dans toute la Russie pour dénoncer la « supercherie » de l'élection présidentielle du 18 mars, à laquelle il a été déclaré inéligible en raison d'une condamnation en justice.

M. Tolstoï a également fustigé « les mensonges impudents » visant les médias publics russes RT et Sputnik, soupçonnés par Paris et Washington de relayer la propagande du Kremlin et d'avoir tenté d'influer sur la campagne présidentielle de 2016 aux États-Unis et de 2017 en France.

En novembre, la chaîne RT s'est notamment vue obligée de s'enregistrer en tant qu'« agent de l'étranger » aux États-Unis.

Les autorités russes ont aussitôt riposté par une loi permettant de classer tout média international opérant en Russie sous cette appellation controversée, étendant ainsi aux médias une loi datant de 2012 qui ne concernait jusqu'à présent que les organisations non gouvernementales.

« La Russie ne peut pas laisser sans réponse les poursuites contre nos journalistes à l'étranger », souligne M. Tolstoï.

Selon lui, « tout le monde n'a pas encore compris en Occident qu'aucun pays au monde n'a le droit moral de donner des leçons à la Russie ».

« Mais lorsque tout le monde l'aura compris, alors on pourra établir des relations fondées sur l'égalité et le respect mutuel », ajoute-t-il.