Les négociations pour organiser le Brexit ont repris jeudi à Bruxelles entre les Européens et le Royaume-Uni, sans grands espoirs d'avancées décisives du côté des 27, de plus en plus préoccupés par la fragilité du gouvernement de Theresa May.

Cette sixième session, organisée au siège de la Commission européenne, sera courte: elle s'achèvera dès vendredi par une conférence de presse commune du négociateur en chef de l'UE Michel Barnier et de son homologue britannique David Davis.

«Il faut plus de progrès sur les trois sujets clés», avait prévenu mercredi M. Barnier, dans un message publié sur Twitter, accompagné d'un graphique détaillant les exigences européennes pour accepter d'ouvrir les négociations commerciales que Londres réclame avec impatience.

Les trois sujets en question sont l'épineux règlement financier du Brexit, le sort des droits des expatriés européens et britanniques après le divorce, programmé fin mars 2019, et les conséquences de la séparation pour l'Irlande.

Ce n'est qu'à condition d'avoir enregistré des «progrès suffisants» dans ces domaines que les Européens accepteront de discuter avec Londres d'une éventuelle période de transition post-Brexit, souhaitée par Mme May, et de l'avenir de leurs relations commerciales.

Ils l'ont une nouvelle fois rappelé lors du dernier Conseil européen en octobre, repoussant à un prochain sommet, à la mi-décembre, la possibilité de constater des avancées suffisantes pour un feu vert à la deuxième phase des négociations.

«Tout est prêt (pour commencer des négociations commerciales, NDLR) dès le 1er janvier», a assuré à l'AFP un diplomate de l'UE. Mais «si nous n'avons pas tout scellé fin novembre ou la première semaine de décembre» sur les trois priorités préalables des 27, «cela reporte à février ou mars» cette perspective, a-t-il ajouté.

«Pas besoin de discours»

«Nous n'avons pas besoin de discours, nous avons besoin d'engagements écrits de la part des Britanniques», a commenté cette source, soulignant que le sixième round commencé jeudi sera «seulement oral» et ne durera «qu'un jour et demi».

Le gouvernement britannique estime de son côté avoir fait un pas important en présentant des propositions pour garantir les droits des Européens souhaitant rester au Royaume-Uni après le Brexit.

«D'importants problèmes doivent encore être résolus» dans ce dossier, avait toutefois averti mercredi dans un communiqué le groupe d'eurodéputés qui suit les négociations du Brexit, mené par le libéral Guy Verhofstadt.

L'autre principale pomme de discorde reste le solde de tout compte que devra verser le Royaume-Uni pour honorer ses engagements financiers envers l'UE.

Le président du Parlement européen Antonio Tajani a récemment affirmé que la facture tournerait autour de «50 ou 60 milliards» d'euros, confirmant pour la première fois des estimations officieuses circulant à Bruxelles, et déplorant «les clopinettes» proposées par Londres.

Les 27 ont malgré tout voulu faire un geste lors de leur sommet d'octobre en acceptant de lancer des «préparatifs internes» pour la négociation de la future relation avec le Royaume-Uni.

Des représentants des 27 ont ainsi évoqué entre eux le sujet pour la première fois lors d'une réunion, mercredi, à Bruxelles.

May fragilisée

L'objectif est «d'être prêt à aller rapidement de l'avant» si des «progrès suffisants» sont constatés en décembre, «mais cela ne préjuge pas du tout de ce qui sera décidé», a insisté une source diplomatique, soulignant que l'ouverture de la deuxième phase des négociations était loin d'être acquise.

Le travail préparatoire entre 27 sur la relation future «reste très théorique» tant que l'UE n'a pas obtenu satisfaction dans la première phase des négociations et «tant qu'on n'a pas une idée plus précise de la nature de la relation future voulue par Londres», a souligné cette source.

Les Européens sont d'autant plus pessimistes qu'ils s'inquiètent de la fragilité grandissante de Mme May, alors qu'ils assurent préférer négocier avec un «partenaire de négociation fort».

Déjà aux prises avec des divisions internes sur les modalités du Brexit, Mme May est encore plus affaiblie depuis la démission mercredi soir d'un nouveau membre de son gouvernement, qui avait rencontré en secret des dirigeants israéliens.

Ce départ de la secrétaire d'État au Développement international Priti Patel est le deuxième au sein du cabinet conservateur en une semaine, après celui du ministre de la Défense Michael Fallon, mis en cause dans un scandale de harcèlement sexuel.

«Nous sommes un peu inquiets de ce que nous voyons en ce moment au Royaume-Uni, nous voulons un partenaire de négociation fort», a dit à l'AFP un diplomate de l'UE.

En outre, la Commission européenne a sensiblement abaissé jeudi sa prévision de croissance en 2017 pour le Royaume-Uni, en soulignant l'«incertitude» persistante liée au Brexit, susceptible de peser sur les investissements des entreprises.