Dix-huit policiers d'un commissariat de la banlieue de Lisbonne ont été formellement accusés d'avoir séquestré et torturé six jeunes hommes d'origine africaine qui protestaient contre l'arrestation de l'un d'entre eux, en 2015, a annoncé la justice mardi.

Placés sous contrôle judiciaire, «18 agents de la Police de sécurité publique ont été renvoyés en procès», a indiqué le parquet de Lisbonne dans un communiqué, confirmant une information révélée par le quotidien Diario de Noticias.

Ils seront jugés pour «des crimes de falsification de document, dénonciation calomnieuse, injure aggravée, violence aggravée, faux témoignage, torture et autres traitements cruels, dégradants ou inhumains, puis séquestration aggravée», a précisé le ministère public.

L'enquête menée avec l'aide de la police judiciaire a débouché sur un acte d'accusation «sans précédent», en raison de la nature raciste des crimes présumés, a commenté le Diario de Noticias, en précisant que les policiers accusés représentaient la totalité de l'effectif du commissariat d'Alfragide, dans la banlieue ouest de Lisbonne.

Les faits remontent à février 2015, après l'arrestation d'un des jeunes du quartier de Cova da Moura, dont la majorité de la population est issue de l'immigration venue du Cap-Vert, une des anciennes colonies africaines du Portugal.

Les cinq autres s'étaient rendus au commissariat pour protester contre une interpellation jugée «arbitraire et violente» quand ils ont été arrêtés à leur tour.

Pendant une garde à vue de 48 heures, les six jeunes hommes, âgés alors de 23 à 25 ans, «ont été humiliés, victimes d'une énorme violence physique et psychologique de la part d'agents de l'autorité dominés par des sentiments de xénophobie, haine et discrimination raciale», écrit le Diario de Noticias, citant les conclusions de l'enquête.

À l'époque, les policiers avaient assuré qu'une vingtaine de jeunes avaient tenté d'envahir le commissariat pour libérer leur ami, une version contredite par les victimes et plusieurs témoins.

Mardi, la Police de sécurité publique a réagi pour invoquer le principe de la présomption d'innocence, en rappelant que deux des agents accusés avaient déjà fait l'objet de sanctions disciplinaires.

Cette affaire avait suscité l'indignation des mouvements antiracistes et d'une association locale oeuvrant à l'intégration des jeunes de ce quartier défavorisé, en proie à des problèmes de délinquance et de trafic de drogue.