Les autorités britanniques sont «furieuses» après les fuites d'informations sur l'attentat de Manchester dans les médias américains ou par d'autres canaux, a indiqué mercredi une source gouvernementale.

«Nous sommes furieux. C'est complètement inacceptable», a indiqué cette source. «Ces images qui fuitent vont être une source de stress pour les victimes, leurs familles et le public», et «ce problème a été soulevé par les autorités britanniques avec leurs homologues américains à tous les niveaux pertinents», a-t-elle ajouté.

La ministre britannique de l'Intérieur, Amber Rudd, avait fait part plus tôt de son exaspération.

«La police britannique a été très claire sur le fait qu'elle veut contrôler le flux d'informations, afin de protéger l'intégrité opérationnelle» de l'enquête et pouvoir bénéficier «d'éléments de surprise», a déclaré Amber Rudd sur la BBC.

«Donc ça devient irritant que (ces informations) sortent via d'autres sources et j'ai été très claire auprès de nos amis sur le fait que cela ne doit pas se reproduire», a-t-elle ajouté.

Alors qu'on lui demandait si les autorités américaines avaient compromis l'enquête, elle a répondu: «Je n'irais pas si loin».

«Mais je peux vous dire qu'elles sont parfaitement au clair concernant cette situation et le fait que cela ne doit pas se reproduire», a-t-elle insisté.

Amber Rudd a évoqué la question par téléphone avec le secrétaire américain à la Sécurité intérieure John Kelly, a fait savoir un porte-parole côté américain.

Quelques minutes après cette déclaration agacée, le ministre français de l'Intérieur Gérard Collomb, affirmant ne savoir «que ce que les enquêteurs britanniques nous ont appris», révélait que le kamikaze présumé de l'attentat était «sans doute» passé par la Syrie et avait des liens «avérés» avec le groupe État islamique.

Plus tard dans la journée, le New York Times a révélé que la bombe détonée par un jeune kamikaze à Manchester lundi soir était puissante et sophistiquée et a publié en exclusivité huit photos montrant différents éléments de l'engin explosif.

Ces photos auraient été prises par des enquêteurs de la police et, selon des sources gouvernementales britanniques, transmises à leurs homologues américains qui les auraient fait fuiter.

Pour les services antiterroristes britanniques, ces fuites ont «déstabilisé» l'enquête. Un porte-parole a souligné l'importance des relations avec les services d'autres pays et de leur coopération. Mais «quand cette confiance est rompue, cela déstabilise ces relations, sape nos enquêtes et la confiance des victimes, des témoins et de leurs familles», a-t-il déploré.

«Le dommage causé est encore plus grand quand cela porte sur la divulgation non autorisée de preuves potentielles en plein milieu d'une enquête antiterroriste importante», a-t-il ajouté.

Ces tensions interviennent alors que la première ministre britannique Theresa May doit rencontrer le président américain Donald Trump lors du sommet de l'OTAN à Bruxelles jeudi.

Le représentant Adam Schiff, de la Californie, le plus haut démocrate au sein du comité du renseignement de la Chambre des représentants, dit comprendre les inquiétudes sur des fuites aux États-Unis risquant de nuire aux opérations policières au Royaume-Uni.

«Si nous avons effectivement agi ainsi, je crois qu'il s'agit d'un véritable problème», a dit M. Schiff.

«Si nous avons fourni de l'information ayant perturbé d'une quelconque façon leur enquête parce qu'elle a alerté des gens au Royaume-Uni - peut-être des associés de cette personne identifiée comme le kamikaze -, alors c'est un véritable problème et ils ont toutes les raisons d'être en colère», a-t-il ajouté.

Néanmoins, le représentant démocrate a dit croire que même si des sources américaines du renseignement ont relayé des informations sensibles aux médias, cela n'affectera probablement pas la relation solide de partage de renseignements entre les États-Unis et le Royaume-Uni, car elle est bénéfique pour les deux pays.

- Avec l'Associated Press

AP

Adam Schiff