À trois jours du premier tour de la présidentielle française, qui vire à un imprévisible «match à quatre», les onze candidats se sont retrouvés jeudi soir pour un dernier round télévisé, tous décidés à convaincre les nombreux indécis et abstentionnistes.

Le président sortant François Hollande a de son côté appelé jeudi «tous les Français à aller voter», les sondages prédisant un taux d'abstention supérieur à 25%.

Les concurrents ont chacun environ 15 minutes d'antenne pour s'exprimer. Ce sera leur dernière grande tribune médiatique avant la clôture officielle, vendredi à minuit, d'une campagne aux multiples rebondissements et au niveau de suspense inédit.

Parmi les premiers à s'exprimer, la dirigeante d'extrême droite Marine Le Pen et le tribun de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, tous deux dans le quatuor de tête de la course présidentielle, ont réitéré leurs critiques de l'Europe.

«L'Europe, on la change ou on la quitte, mais nos partenaires voudront que nous restions, car il n'y a pas d'Europe sans la France (...). Les Allemands ne sont ni nos ennemis, ni nos maîtres, ce sont nos partenaires», a insisté M. Mélenchon, qui prône une révision des traités européens, défend «une France indépendante qui soit championne du monde de la paix» et assure qu'il n'est pas «un homme de pagaille».

Pour sa part, Marine Le Pen veut «rendre aux Français les clés de la maison France» et milite pour la sortie de l'euro ainsi que «le retour à une monnaie nationale en adéquation avec notre économie», assurant que «tous les étrangers condamnés pour des délits ou des crimes doivent rentrer chez eux».

Quatre candidats sont en position de se qualifier pour le second tour, le 7 mai, et comptent bien marquer des points, à l'heure où les choix des électeurs se déterminent : Marine Le Pen, le centriste Emmanuel Macron, le conservateur François Fillon et Jean-Luc Mélenchon.

M. Macron et Mme Le Pen sont à l'heure actuelle donnés en tête des intentions de vote, suivis de près par M. Fillon et M. Mélenchon, et le sprint final sera d'autant plus serré que les pronostics des sondeurs pour le premier tour se situent dans la marge d'erreur.

«Avec au moins entre 20 à 25% d'indécis parmi les gens certains d'aller voter, ces trois derniers jours sont «LE» moment de cristallisation pour près de dix millions d'électeurs», observe Chloé Morin, de la Fondation Jean-Jaurès, un groupe de réflexion socialiste.

Coup de fil d'Obama

Chaque prétendant cherche désormais à imprimer de sa marque les dernières heures de la campagne.

Mme Le Pen a musclé ces derniers jours son discours sur les thématiques traditionnelles de son parti, l'immigration et la sécurité. Et d'affirmer jeudi qu'elle serait «en tête» dimanche au soir du premier tour, assurant sentir «une incroyable mobilisation» de ses électeurs.

Après qu'un projet d'attentat «imminent» a été déjoué lundi, Emmanuel Macron s'est présenté comme le seul à même d'«assurer la sécurité» des Français.

Le candidat de 39 ans a par ailleurs reçu un «appel amical» de l'ancien président américain Barack Obama pour évoquer «l'importante élection présidentielle à venir en France», selon le porte-parole de ce dernier, qui a précisé que ce coup de fil ne valait pas soutien au candidat centriste.

François Fillon, quant à lui, est déterminé à faire mentir ceux qui l'avaient enterré après les révélations fin janvier sur des emplois fictifs présumés attribués à sa famille et rémunérés sur les deniers publics, qui lui valent une inculpation.

Dans ses derniers rassemblements, il n'a eu de cesse de marteler que la présidentielle se jouerait dans les derniers jours de campagne, même si son image de sérieux et de probité a été brouillée et sa légitimité contestée jusque dans son propre camp.

Le candidat conservateur s'est efforcé toute la semaine de montrer l'unité d'une droite qui a frôlé l'implosion. Il cherche aussi à tirer avantage de la récente percée de l'antieuropéen et antimondialiste Jean-Luc Mélenchon dont le profil inquiète les électeurs de droite, appelés à serrer les rangs face à la menace «communiste».