Le Commissaire européen à l'agriculture Phil Hogan a solennellement mis en garde jeudi à Paris les agriculteurs français contre toute tentation de voter Le Pen à la présidentielle, estimant que la proposition de la candidate FN de «franciser» les aides à l'agriculture n'était pas crédible.

Cette idée lancée par la candidate Front National est «mauvaise» a déclaré le Commissaire, un Irlandais, lors de sa visite au salon de l'Agriculture à Paris.

Marine Le Pen «adopte la position britannique de faire peur aux agriculteurs et de leur faire croire que tout ira bien si on se débarrasse de l'Europe», or les agriculteurs britanniques vont être «les grands perdants» du Brexit et ne toucheront plus d'aides directes de leur gouvernement après 2020, a dit le Commissaire.

«Les agriculteurs britanniques réalisent maintenant qu'ils vont perdre environ 15 000 livres chacun par an en termes d'aide directe» a dit M. Hogan, «c'est une tragédie».

En Grande-Bretagne, «il n'y a aucune proposition du ministre pour remplacer» les aides directes européennes, et en fin de compte «il ne va plus y avoir d'aide directe ni de filet de sécurité. Est-ce que c'est cela que Madame Le Pen veut» pour les agriculteurs français? s'est-il interrogé.

Le Commissaire a rappelé que l'agriculture française touchait 9,5 milliards euros (13,393 milliards de dollars canadien) d'aide directe de l'Europe. «Certains candidats ont tendance à l'oublier» a-t-il ajouté.

Cette somme représente quasi la moitié de ce que la France paie à l'Union européenne en contribution annuelle.

Or, les agriculteurs ne représentent même pas 2% de la population française.

«En France, rien ne garantit que les agriculteurs, qui pèsent moins de 2% de la population du pays, puissent continuer à bénéficier de 9 milliards d'euros d'aide sur le budget national si le pays devait renationaliser ses aides» souligne-t-on dans l'entourage du Commissaire.

M. Hogan a dit par ailleurs vouloir «simplifier» l'actuelle Politique agricole commune (PAC), pour aider le maximum d'agriculteurs en difficulté.

Marine Le Pen en visite mardi au salon avait martelé qu'il était «temps d'en finir avec l'Union européenne» et la Politique agricole commune, et proposé de «franciser les aides» aux agriculteurs.

M. Hogan a par ailleurs rappelé que le secteur permettait à la France de générer 15 milliards d'euros d'excédent commercial, et que l'industrie agroalimentaire pesait «plusieurs dizaines de milliers d'emplois» dans le pays.

Il a jugé «très inquiétants» les chiffres de la Mutualité sociale agricole (MSA) selon lesquels 50% des agriculteurs français ont eu un revenu mensuel inférieur à 350 euros en 2016 en raison des différentes crises qui ont affecté le secteur l'an dernier.

«C'était avec les subventions européennes?» a-t-il demandé à l'AFP en réponse à une question sur le sujet.