Menacé par une mise en examen, perquisitionné à son domicile parisien, de plus en plus isolé, le candidat conservateur à la présidence française François Fillon ne cède pas et s'efforce de relancer sa campagne.

Lors d'un rassemblement à Nîmes, dans le sud de la France, M. Fillon, 62 ans, a montré jeudi soir sa détermination à maintenir sa candidature quoi qu'il arrive.

«Vous avez devant vous un combattant. Que celles et ceux qui ont du cran se lèvent!», a lancé l'ancien Premier ministre, ovationné par quelque 3000 militants chauffés à blanc.

Et il a de nouveau attaqué la justice et les médias. «Sept jours sur sept, 24 heures sur 24, la machine à broyer, la machine à primeurs, la machine à rumeurs s'est mise en marche. Mais je vous le redis: je n'ai pas l'intention de me coucher», a-t-il prévenu.

Ancien favori de la présidentielle, M. Fillon a reculé en troisième position dans les sondages après le scandale suscité par les salaires d'assistants parlementaires touchés par son épouse Penelope et deux de ses enfants.

Ces salaires, représentant au total des centaines de milliers d'euros d'argent public sur des années, sont soupçonnés d'avoir correspondu à des emplois fictifs.

M. Fillon a annoncé mercredi sa convocation chez les juges le 15 mars «pour être mis en examen» (inculpé). Dénonçant un «assassinat politique», il a réaffirmé sa volonté d'aller «jusqu'au bout».

«La base tient»

Mais son maintien suscite de nombreuses défections dans son parti Les Républicains (LR). Une quinzaine d'élus locaux lui ont demandé «solennellement» de se retirer, estimant dans une tribune qu'«un pacte moral a été rompu».

Des responsables qui avaient soutenu l'ancien Premier ministre Alain Juppé lors de la primaire de la droite, largement remportée par M. Fillon, ont décidé de le lâcher dans l'espoir de le remplacer par leur champion.

En maintenant sa candidature, François Fillon «emporte son camp dans une course vers l'abîme», a affirmé l'ancien Premier ministre de droite Dominique de Villepin.

Mais tout cela ne semble pas avoir entamé la détermination du candidat. Si des élus s'éloignent, «la base, elle, tient» et «je m'appuie sur les Français», a rétorqué M. Fillon devant la presse. Et s'il était lâché par tous les élus LR? «On fera sans eux!», a-t-il répliqué.

Cette résolution est reçue avec scepticisme par certains. «Fillon se bunkérise, c'est comme une secte. À mon avis, dans 24 ou 48 heures, ça pète», a déclaré une source du parti LR à l'AFP.

Sur le plan judiciaire, un nouvel épisode est intervenue jeudi avec une perquisition au domicile parisien de François et Penelope Fillon, selon des sources concordantes.

Mise en garde

Un rassemblement de soutien à la candidature de M. Fillon a été annoncé pour dimanche après-midi place du Trocadéro à Paris. L'annonce a suscité une mise en garde du président François Hollande. «Il ne peut pas y avoir de manifestation (...) qui puisse mettre en cause les institutions, la justice ou le travail de la police dans le cadre des enquêtes», a dit M. Hollande.

Les déboires de M. Fillon semblent profiter au candidat centriste Emmanuel Macron, qui engrange les ralliements au fil des semaines: selon les dernières enquêtes d'opinion, l'ancien ministre de l'Économie du président socialiste Hollande se trouve désormais en tête pour affronter et vaincre au second tour de la présidentielle, le 7 mai, la dirigeante du Front national (FN, extrême droite) Marine Le Pen.

M. Macron, 39 ans, a présenté jeudi les détails de son programme, pro-UE et d'inspiration sociale libérale. Il a promis s'il était élu une «grande loi» de moralisation de la vie publique.

Marine Le Pen voit elle aussi la pression judiciaire grandir sur elle. Son immunité a été levée par le Parlement européen à la demande de la justice française, qui lui reproche d'avoir diffusé sur son compte Twitter des images d'exactions sanglantes du groupe Etat islamique, pour répliquer à un rapprochement fait par un journaliste entre l'EI et le Front national.

Forte de son immunité, Marine Le Pen a refusé jusqu'ici de répondre aux convocations de la justice française dans ce dossier. Elle a récemment repoussé une autre convocation dans une enquête sur les soupçons d'emplois fictifs concernant plusieurs assistants parlementaires d'eurodéputés du Front national.