Le camp socialiste français, affaibli et divisé, désigne dimanche son candidat à la présidentielle entre le favori Benoît Hamon et l'ex-premier ministre Manuel Valls, dans une campagne perturbée par une retentissante affaire fragilisant le candidat de droite.

M. Valls, qui met en avant son expérience du pouvoir dans un contexte international difficile et face à la menace djihadiste en France, s'affiche comme le candidat de la « crédibilité ». Il a qualifié d'« utopiste » le programme centré sur la justice sociale de son adversaire.

À Paris, Annick Descamps, a néanmoins voté Benoît Hamon, 49 ans, parce qu'« il apporte des principes dans la citoyenneté, la solidarité et la répartition des richesses [...]. On a toujours besoin de rêves et d'un projet qui tient la route », dit cette architecte de 60 ans.

Retraitée de 77 ans, Marie-France a, elle, voté à Rennes (ouest) pour Manuel Valls, 54 ans, car « il a plus de chances pour la présidentielle », même si elle évoque de « tels bouleversements (dans le paysage politique) qu'on est vraiment dans l'incertitude ».

Plus de 7000 bureaux de vote sont ouverts en France métropolitaine jusqu'à 18 h GMT (13 h, HE). À la mi-journée, l'élection avait mobilisé 567 563 votants sur 75 % des bureaux de vote, soit une hausse « de plus de 21 % » par rapport au même échantillon lors du premier tour dimanche dernier, a affirmé le Parti socialiste.

Selon les commentateurs, les divergences des candidats, l'un à droite du Parti socialiste (PS), l'autre à l'aile gauche, creusent la fracture des « deux gauches » et risquent de compromettre l'impératif de rassemblement après la primaire, dans un contexte déjà difficile.

La presse évoquait dimanche un « risque de balkanisation » pour le parti, qui sort émietté après cinq ans au pouvoir.

Depuis des mois, le vainqueur de la compétition, quel qu'il soit, est donné disqualifié au premier tour de la présidentielle le 23 avril, loin derrière la candidate de l'extrême droite Marine Le Pen, galvanisée par le Brexit et la victoire de Donald Trump à la présidentielle américaine, et le conservateur François Fillon.

Le candidat du PS serait aussi, selon les sondages, derrière Emmanuel Macron, ex-ministre de gauche repositionné au centre, qui fait salle comble et engrange un flux ininterrompu de ralliements, et le tribun de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon.

Mais à trois mois de la présidentielle, des soupçons d'emploi fictif visant l'épouse de François Fillon, Penelope, ont précipité dans la tourmente le candidat de la droite, qui bataille pour préserver ses chances à l'élection.

Celui qui a fait de la probité en politique un thème clé de sa campagne pourrait en outre être inquiété par une autre affaire : selon deux médias, il aurait détourné de l'argent public lorsqu'il était sénateur voici dix ans.

« Présidentielle très ouverte »

Dans ce contexte de campagne riche en surprises et rebondissements, les deux prétendants socialistes veulent démentir le scénario écrit de leur défaite.

« En vérité la victoire est là, à portée de main, à condition que nous propulsions [...] un futur désirable », a lancé vendredi soir l'ex-ministre de l'Éducation Benoît Hamon lors d'un ultime rassemblement.

Son rival, lui, cite l'affaire Penelope Fillon comme « la démonstration que l'élection présidentielle est très ouverte ». Et pour la primaire, il veut aussi croire que « rien n'est joué, quelques centaines de milliers d'électeurs en plus - et j'espère bien davantage -, et tout change! », a clamé Manuel Valls.

L'affluence s'est révélée médiocre au premier tour, signe du rejet des électeurs déçus par la politique du président socialiste sortant François Hollande : 1,65 million de votants, quand la primaire de droite avait réuni en novembre plus de 4 millions de personnes.

Au premier tour du 22 janvier, M. Hamon était arrivé en tête avec 36 % des voix contre 31,5 % des voix pour M. Valls. Le challenger socialiste est en outre conforté par le ralliement du troisième homme, le chantre du « made in France » Arnaud Montebourg (17,5 %).

Révélation de la campagne devenu favori du scrutin, Benoît Hamon séduit avec sa vision innovante sur la transition écologique, le travail, les perturbateurs endocriniens... Il a aussi placé sa proposition phare au centre des débats, celle d'un revenu universel d'existence - de 750 euros à terme -, sans pour autant chiffrer clairement son financement.