L'Allemagne a annoncé mercredi rechercher activement un demandeur d'asile tunisien de 24 ans, soupçonné d'être l'auteur de l'attentat qui a fait 12 morts à Berlin, le plus grave jamais revendiqué par le groupe État islamique (EI) dans le pays.

Anis Amri a été officiellement identifié par la justice antiterroriste qui, dans un avis de recherche européen, propose jusqu'à 100 000 euros (près de 140 000 $ CAN) de récompense.

«Anis Amri mesure 1,78 m, pèse environ 75 kg. Il a des cheveux noirs et des yeux bruns. Il peut être violent et armé!» met en garde le parquet fédéral à l'attention de la population.

En parallèle, la police tunisienne a interrogé des membres de la famille du suspect en Tunisie, selon une source sécuritaire.

«Quand j'ai vu la photo de mon frère dans les médias, je n'en ai pas cru mes yeux. Je suis sous le choc et je ne peux croire que c'est lui qui a commis ce crime», a réagi auprès de l'AFP Abdelkader Amri, frère du suspect. Mais «s'il s'avère qu'il est coupable, il mérite alors toutes les condamnations. Nous rejetons le terrorisme et les terroristes et nous n'avons aucune relation avec les terroristes».

image police française/AFP

Les autorités allemandes ont annoncé mercredi rechercher activement un Tunisien « classé dangereux », suite à l'attentat au camion-bélier sur un marché de Noël de Berlin, le plus grave jamais revendiqué par le groupe État islamique (EI) dans le pays.

Déjà connu pour radicalisation 

Dès mardi soir, les autorités allemandes se sont lancées à la recherche du Tunisien, après avoir relâché un premier suspect pakistanais mis finalement hors de cause dans l'attaque au camion-bélier sur un marché de Noël.

Ayant retrouvé des documents d'identité dans la cabine du camion qui a servi à l'attentat, la police a d'abord tenté de le retrouver sans alerter l'opinion.

Environ 150 policiers ont notamment perquisitionné un foyer de réfugiés dans l'ouest du pays, à Emmerich, où l'homme a séjourné il y a quelques mois, selon des médias allemands. Faute de résultat, les autorités se sont résolues à publier l'avis de recherche.

Surtout, les autorités allemandes disposaient d'une multitude d'indications sur la radicalisation et la dangerosité de ce demandeur d'asile, utilisant plusieurs identités, sans avoir réussi à l'expulser ou à l'interpeller. Ce qui risque de nourrir dans les jours à venir la polémique en Allemagne.

Photo fournie par la police allemande/AP

Une photo du suspect Anis Amri envoyée aux polices européennes, le 21 décembre.

L'homme était «classé dangereux», connu des services de sécurité, et appartenait «au milieu islamiste-salafiste», a dit un député, Stephan Mayer.

Un autre responsable allemand, Ralf Jäger, a révélé que le suspect avait été débouté en juin de sa demande d'asile et surtout qu'il faisait déjà l'objet d'une enquête pour soupçon de préparation d'attentat avant l'attaque au camion-bélier.

Il était soupçonné de vouloir commettre un braquage pour acheter des «armes automatiques et probablement ensuite, avec l'aide de complices qu'il voulait trouver, de commettre un attentat», a révélé la justice berlinoise dans la soirée.

Le suspect aurait été aussi en contact avec plusieurs recruteurs présumés de l'EI en Allemagne, selon la presse.

Merkel critiquée 

Le parquet de Berlin, qui a récupéré l'enquête à son sujet en mars, s'est défendu face à la controverse naissante sur l'inefficacité de la justice en expliquant avoir surveillé de près le Tunisien. Mais en dehors d'une activité de «petit trafiquant de drogue» et une bagarre dans un bar, aucun élément justifiant son arrestation n'a été trouvé. Le dossier a été classé sans suite en septembre.

Dans le même temps, son expulsion n'a pu aboutir en raison d'un conflit administratif entre Tunis et Berlin. Selon les autorités allemandes, la Tunisie a refusé depuis juin de le reprendre en contestant qu'il soit l'un de ses ressortissants. Tunis n'a fini par le reconnaître, hasard de calendrier, que ce mercredi.

photo police allemande/AP

Une autre photo du suspect Anis Amri envoyée aux polices européennes, le 21 décembre.

La Tunisie est l'un des plus gros fournisseurs de combattants étrangers aux mouvements djihadistes. Quelque 5500 Tunisiens sont partis ainsi combattre en Syrie, en Irak ou en Libye.

Selon des médias allemands, le suspect pourrait être blessé après avoir percuté le marché avec le camion, dont la cabine était très abîmée. Des traces de sang y ont été retrouvées et la police a effectué des vérifications dans des hôpitaux berlinois, selon ces médias.

La police a indiqué examiner plus de 500 indices (traces ADN recueillies dans le camion, vidéo-surveillance, des témoignages...)

Le chauffeur routier polonais en titre du camion, retrouvé tué par balle dans la cabine et à qui l'assaillant a apparemment volé le véhicule, a probablement cherché à empêcher l'attentat, selon des médias allemands. Il aurait tenté de s'emparer du volant et aurait forcé l'auteur de l'attentat à s'arrêter plus tôt que prévu.

Hannibal Hanschke, REUTERS

Les enquêteurs ont retrouvé un document d'identité sous le siège du conducteur dans la cabine du poids lourd qui a délibérément foncé sur des chalets en bois d'un marché de Noël très fréquenté, tuant 12 personnes. L'attentat a été revendiqué par les djihadistes du groupe État islamique.

Berlin n'a pas encore authentifié la revendication de l'EI, mais le parquet antiterroriste a jugé que la cible et le mode opératoire signaient l'acte djihadiste : les circonstances rappellent l'attaque au camion-bélier le 14 juillet à Nice en France (86 morts), revendiquée par l'EI.

Les mesures de sécurité ont été renforcées à Berlin et un débat s'est engagé en Allemagne à la fois sur la nécessité de protéger davantage les lieux publics et autour de la politique d'immigration de la chancelière Angela Merkel.

Mercredi soir, deux manifestations distinctes, à l'appel notamment du parti néo-nazi NPD et de la formation de droite populiste Alternative pour l'Allemagne (AfD), ont rassemblé un peu plus de 300 personnes qui ont réclamé la «fermeture des frontières» et le départ de Mme Merkel, selon l'agence allemande DPA.

photo police allemande/AP

Anis Amri