Les dirigeants des 28 pays de l'Union européenne se sont retrouvés jeudi à Bruxelles pour afficher un front commun face au rôle décrié de la Russie en Syrie comme en Ukraine, lors d'un sommet censé aussi faire avancer les préparatifs du Brexit.

Face au drame des habitants d'Alep, «l'Europe doit faire entendre sa voix», a exhorté le président français François Hollande à son arrivée, accusant la Russie, alliée du régime syrien, «de prendre des engagements qu'elle ne tient pas».

La Première ministre britannique Theresa May a elle aussi appelé à la fermeté contre le régime syrien, et «ses soutiens en Russie et en Iran», estimant que «ceux qui sont responsables de ces atrocités» à Alep devront «rendre des comptes».

Elle a aussi évoqué d'emblée le divorce prochain de son pays avec l'UE. «Nous voulons que cela soit un processus aussi en douceur et ordonné que possible», dans l'intérêt des deux parties, a-t-elle déclaré.

Outre les nombreux sujets à l'agenda du sommet, incluant la crise migratoire et la relance de la défense européenne, la Grèce s'est aussi invitée au menu, après la brusque suspension la veille du toilettage de sa dette par la présidence de l'Eurogroupe.

Le Premier ministre grec Alexis Tsipras a déploré un «chantage», après cette suspension demandée par l'Allemagne en raison de mesures sociales adoptées par la Grèce. M. Tsipras a reçu le soutien appuyé de François Hollande, qui a demandé «que la Grèce soit traitée dignement».

L'inconnue Trump

Les 28 devraient réussir à s'entendre pour reconduire leurs sanctions économiques contre Moscou, imposées en 2014 après la destruction du vol MH17 de la Malaysia Airlines au-dessus de l'Est séparatiste de l'Ukraine (298 morts). «Je table sur le fait qu'il y aura un consensus» des 28, a affirmé un responsable allemand.

Selon un diplomate européen, il n'y a en revanche «pas de consensus qui émerge sur des sanctions liées à la Syrie, et ce d'autant plus qu'il est impossible d'avoir une lisibilité sur les intentions de la prochaine administration américaine» vis-à-vis de Moscou.

Un projet de conclusions du sommet, consulté par l'AFP, prévoit de «condamner avec force l'assaut continu sur Alep par le régime syrien et ses alliés, notamment la Russie», évoquant «la prise pour cible délibérée de civils et d'hôpitaux».

L'UE «considère toutes les options disponibles», est-il indiqué dans ce document provisoire, qui ne mentionne toutefois pas la possibilité de sanctions contre la Russie. Mais «les choses peuvent évoluer» en fonction de la situation sur le terrain.

À Alep, les premiers bus et ambulances transportant des blessés et des civils ont quitté jeudi en début d'après-midi les quartiers rebelles de la deuxième ville de Syrie, a constaté une journaliste de l'AFP.

Les dirigeants des 28 auront aussi la Russie à l'esprit quand ils discuteront de l'accord d'association UE-Ukraine, que les Pays-Bas sont le seul pays à ne pas avoir ratifié, après son rejet par référendum.

«Retirer le traité de la table est le plus grand cadeau que l'on puisse faire à Vladimir Poutine», a estimé le premier ministre néerlandais Mark Rutte, se disant «modérément optimiste» sur une issue positive.

Pour tenir compte des résultats de ce vote sans bloquer l'adoption du traité par l'UE, M. Rutte demande des «garanties». Il s'agit surtout de «pouvoir dire que cet accord n'est pas l'antichambre d'une adhésion de l'Ukraine», explique un diplomate européen.

May privée de dîner

Theresa May devra s'éclipser à l'heure du dîner pour laisser ses homologues peaufiner discrètement ce que sera leur méthode de négociation avec le Royaume-Uni, une fois que Londres aura déclenché la procédure du divorce.

Selon une source européenne, les 27 devraient ensuite s'entendre sur un court texte prônant «l'ouverture le plus rapidement possible des négociations» avec Londres, une fois officiellement enclenché le processus de sortie du Royaume-Uni via l'activation de l'article 50 du Traité de Lisbonne.

Le document devrait souligner qu'ils seront «prêts à négocier» dès qu'ils recevront la notification promise par Mme May d'ici le 31 mars 2017.

«L'enjeu est de mettre en place notre dispositif, nos procédures, pour être en ordre de bataille», a expliqué un diplomate européen, indiquant que le dîner n'aborderait pas le fond des futures négociations avec Londres, mais «clarifierait» les rôles côté UE dans la négociation à venir.

Le Parlement européen, qui devra donner en fin de course son feu vert à l'accord avec Londres, a prévenu mercredi qu'il n'accepterait d'être relegué «à une position secondaire dans le processus de négociation».