Le chef du gouvernement italien Matteo Renzi a gagné lundi quelques jours de sursis avant sa démission attendue, afin de ne pas laisser l'Italie sans budget, au lendemain de l'échec de son référendum constitutionnel.

Après un conseil des ministres qui a duré à peine dix minutes, Matteo Renzi, 41 ans, avait remis lundi soir son sort entre les mains du président Sergio Mattarella, chef d'État discret qu'il a rencontré une demi-heure au Quirinale, siège de la présidence italienne.

M. Mattarella, 75 ans, a pris acte de la volonté du jeune président du Conseil de démissionner, mais lui a aussitôt demandé de reporter sa décision jusqu'au vote définitif de la loi de finances 2017, selon un communiqué de la présidence.

Ce vote devant le Sénat, après un premier vote déjà acquis à la Chambre des députés, pourrait avoir lieu avant la fin de la semaine, selon les médias italiens.

« Mon expérience de chef de gouvernement s'arrête là », avait sobrement résumé dans la nuit M. Renzi (centre gauche), avant même que les 59,11 % de non à « sa » réforme constitutionnelle soient officiels. « J'ai perdu, j'en prends toute la responsabilité ».

Une fois ce budget définitivement adopté, M. Mattarella devrait nommer un gouvernement « technique », chargé principalement de réformer la loi électorale. Au grand dam des populistes du Mouvement 5 étoiles (M5S) et de la Ligue du Nord qui ont réclamé une dissolution immédiate du Parlement.

« Les Italiens doivent être appelés à voter le plus rapidement possible », a martelé Beppe Grillo, chef du M5S, sur son blogue. « Première force politique du pays, nous sommes prêts à faire toutes les démarches nécessaires pour arriver à des élections », a-t-il ajouté.

« À partir de la semaine prochaine, nous commencerons à voter sur l'internet notre programme de gouvernement et ensuite sur notre équipe », a-t-il poursuivi.

Même discours du côté de la Ligue du Nord, mouvement anti-euro et anti-immigration, dont le leader Matteo Salvini a lui aussi réclamé des élections au plus vite.

Selon les derniers sondages, le M5S pourrait remporter la majorité à la Chambre des députés, porté par le même malaise qui a poussé au vote du Brexit au Royaume-Uni, à l'élection de Donald Trump aux États-Unis ou encore aux 47 % obtenus dimanche par l'extrême droite en Autriche.

Mais la loi électorale actuelle, adoptée en mai 2015, ne prévoit de prime majoritaire que pour la chambre basse. L'échec de la réforme constitutionnelle maintient tous ses pouvoirs à un Sénat qui reste élu à la proportionnelle, ce qui risque de rendre le pays ingouvernable.

« Démocratie solide »

Les autres formations politiques, majoritaires au Parlement actuel, semblaient s'accorder sur la nécessité d'une nouvelle réforme électorale, dont les contours restent incertains.

Plusieurs noms circulaient pour prendre la suite de M. Renzi, dont son ministre des Finances, Pier Carlo Padoan, ou encore le président du Sénat, Pietro Grasso.

Face à ces incertitudes, les partenaires européens et les marchés financiers redoutent une nouvelle phase d'instabilité politique dans la troisième économie de la zone euro, à l'heure où ses banques montrent d'inquiétants signes de faiblesse.

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Franck-Walter Steinmeier, a ainsi relevé que la victoire du Non n'était « pas un message positif pour l'Europe en ces temps difficiles ».

Lundi, la Bourse de Milan était en légère baisse, mais les autres bourses européennes ont globalement progressé. L'euro s'est repris après avoir plongé dans la nuit à son niveau le plus faible depuis mars 2015.

« Le Non avait déjà été en grande partie pris en compte », a expliqué l'économiste Lorenzo Codogno.

Arrivé au pouvoir en février 2014, Matteo Renzi laisse derrière lui une Italie ayant renoué avec la croissance, mais pas suffisamment pour changer la donne dans le pays.

Lundi en début d'après-midi, il a diffusé sur les réseaux sociaux une série de 45 fiches présentant son bilan - réforme du travail, unions civiles... - avec ce commentaire : « Mille jours difficiles, mais beaux. Merci à tous, vive l'Italie ».

Arrivé sur un programme de réformes tous azimuts et de renouvellement de la classe politique, il a vite usé son message volontariste inspiré du « Yes we can » de Barack Obama.