Le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, doit remettre sa démission lundi en début de soirée, au lendemain d'un camouflet dans les urnes, annonçant une période d'incertitudes, mais pas nécessairement l'arrivée des populistes au pouvoir.

«Mon expérience de chef de gouvernement s'arrête là», a sobrement résumé dans la nuit M. Renzi (41 ans, centre gauche), avant même que les 59,11 % de non à «sa» réforme constitutionnelle soient officiels. «J'ai perdu, j'en prends toute la responsabilité».

Après un dernier conseil des ministres à 12h30 (HE), M. Renzi se rendra au palais du Quirinal donner sa démission au président Sergio Mattarella, chef d'État discret et effacé à qui il revient de gérer la transition.

Il pourrait convoquer des élections anticipées ou, plus vraisemblablement, nommer un gouvernement «technique» chargé de réformer la loi électorale. Au grand dam des populistes du Mouvement 5 étoiles (M5S) et de la Ligue du Nord qui ont réclamé une dissolution immédiate du Parlement.

«Les Italiens doivent être appelés à voter le plus rapidement possible», a martelé Beppe Grillo, chef du M5S, sur son blogue. «La chose la plus rapide, réaliste et concrète pour aller tout de suite au vote est d'y aller avec une loi qui existe déjà, l'Italicum».

Cette loi électorale, adoptée en mai 2015, prévoit une forte prime majoritaire à la Chambre des députés. Mais avec l'échec de la réforme constitutionnelle, le Sénat garde tous ses pouvoirs et reste élu à la proportionnelle, ce qui risque de rendre le pays ingouvernable.

Selon les derniers sondages, le M5S pourrait remporter la majorité à la chambre des députés, porté par le même malaise qui a poussé au vote du Brexit au Royaume-Uni, à l'élection de Donald Trump aux États-Unis ou encore aux 47 % obtenus par l'extrême droite en Autriche.

«Mille jours difficiles»

Les autres formations politiques, majoritaires au Parlement actuel, semblaient s'accorder sur la nécessité d'une nouvelle réforme électorale, dont les contours restent cependant incertains.

Selon les médias italiens, M. Renzi a déjà passé une heure lundi matin avec M. Mattarella.

Dans un bref communiqué, M. Mattarella a salué la forte participation au référendum (65 %), «témoignage d'une démocratie solide», et appelé «à la sérénité et au respect réciproque».

Il a aussi évoqué «les engagements et les échéances que les institutions devront respecter dans tous les cas». Selon des observateurs, il s'agit d'abord de l'adoption du budget, qui pourrait être la première mission d'un gouvernement «technique», à moins que l'actuelle équipe ne le fasse avant de remettre son mandat.

Plusieurs noms circulaient pour prendre la suite de M. Renzi, en particulier celui de son ministre des Finances, Pier Carlo Padoan. Sa nomination pourrait avoir l'avantage de rassurer les marchés qui redoutent une nouvelle phase d'instabilité dans la troisième économie de la zone euro.

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Franck-Walter Steinmeier, a ainsi relevé que la victoire du non n'était «pas un message positif pour l'Europe en ces temps difficiles».

Lundi cependant, la Bourse de Milan s'est redressée après avoir ouvert en baisse de plus de 1 %, et l'euro s'est repris après avoir plongé dans la nuit à son niveau le plus faible depuis mars 2015. Et même s'il grimpait nettement, le taux d'emprunt à 10 ans de l'Italie était loin de s'envoler.

«Le non avait déjà été en grande partie pris en compte», a expliqué l'économiste Lorenzo Codogno.

Arrivé au pouvoir en février 2014, Matteo Renzi laisse derrière lui une Italie ayant renoué avec la croissance, mais pas suffisamment pour changer la donne dans le pays.

Lundi en début d'après-midi, il a diffusé sur les réseaux sociaux une série de 45 fiches présentant son bilan - réforme du travail, unions civiles... - en commentant: «Mille jours difficiles, mais beaux. Merci à tous, vive l'Italie».

Il était arrivé sur un programme de réformes tous azimuts et de mise à la casse de la vieille classe politique de son pays. Mais son message volontariste inspiré du «Yes we can» de Barack Obama s'est vite usé.

Une large majorité de la classe politique, de la droite classique aux populistes, en passant par tous les extrêmes et même des «frondeurs» de gauche du Parti démocrate de M. Renzi, avait appelé à voter non.