Le très impopulaire président socialiste français François Hollande a annoncé jeudi qu'il ne briguait pas un second mandat en 2017, expliquant vouloir éviter une déroute de son camp face à la droite et l'extrême droite.

Le chef de l'État, 62 ans, a mis fin à un long suspense lors d'une allocution solennelle télévisée depuis le palais de l'Élysée à Paris.

« Je suis conscient des risques que ferait courir une démarche, la mienne, qui ne rassemblerait pas largement autour d'elle. Aussi, j'ai décidé de ne pas être candidat à l'élection présidentielle », a-t-il annoncé, la voix blanche. « L'exercice du pouvoir, les lieux du pouvoir, le rythme du pouvoir ne m'ont jamais fait perdre ma lucidité ».

Très impopulaire depuis son accession à l'Élysée en mai 2012, M. Hollande s'est rangé à l'avis de sondages très défavorables : seuls 13 % des Français lui font confiance et il ne récolterait que 7 % des voix au premier tour de la présidentielle en avril, loin derrière le candidat de la droite François Fillon et la chef de l'extrême droite Marine Le Pen.

Selon les sondages, qui ont échoué à pronostiquer le vainqueur de la primaire de droite, le second tour de la présidentielle en mai 2017 verrait s'affronter la droite et l'extrême droite, dopée par la poussée populiste en Europe et aux États-Unis.

L'annonce du président est intervenue quatre jours après la désignation du candidat de la droite et au jour d'ouverture du dépôt des candidatures pour la primaire de la gauche qui doit se tenir les 22 et 29 janvier.

Ses multiples déplacements sur le terrain et son insistance à affirmer que le pays se redresse sur le plan économique faisaient croire à certains ces derniers jours qu'il tentait de légitimer une candidature.

Il a d'ailleurs souligné jeudi soir les avancées auxquelles il a contribué depuis son arrivée au pouvoir.

« Échec patent »

« L'engagement majeur que j'ai pris devant vous était de faire baisser le chômage (...) Les résultats arrivent plus tard que je ne les avais annoncés, j'en conviens, mais ils sont là », a expliqué M. Hollande. « Aujourd'hui, les comptes publics sont assainis, la Sécurité sociale est à l'équilibre et la dette du pays a été préservée », a-t-il aussi plaidé.

M. Hollande a également évoqué un « modèle social conforté ».

« Ce soir, le président de la République admet, avec lucidité, que son échec patent lui interdit d'aller plus loin. Ce quinquennat s'achève dans la pagaille politique et la déliquescence du pouvoir », a aussitôt commenté le candidat de la droite, François Fillon.

Ces derniers jours, une guerre sourde a opposé François Hollande à son premier ministre Manuel Valls, coincé entre son devoir de loyauté à l'égard du chef de l'État et son ambition présidentielle pour 2017 qu'il ne cache plus.

Le président socialiste n'a jamais bénéficié de bonnes opinions à l'exception d'une courte période après les attentats djihadistes de janvier 2015 contre le magazine satirique Charlie Hebdo, une policière et un supermarché cacher.

Les Français lui reprochent en particulier son orientation pro-entreprises prise il y a deux ans.

L'augmentation sans précédent de la pression fiscale sur les Français et les entreprises, accompagnée d'une baisse des dépenses publiques, a mis secteur par secteur les Français dans la rue, criant à la tromperie à l'égard de celui qui avait promis la rupture avec la présidence de Nicolas Sarkozy favorable aux classes aisées.

La dernière réforme de son mandat, annoncée au printemps dernier, et qui portait sur le Code du travail a provoqué de nombreuses manifestations anti-Hollande, parfois violentes, pendant plus de trois mois.

La publication en octobre d'un recueil de confidences de François Hollande à deux journalistes a sidéré ceux qui, contre vents et marées, lui témoignaient encore leur soutien. Dans ce livre, le président, qui se décrit lui-même comme « le spectre de l'Élysée », multiplie les piques sur ses proches.

Son mandat, marqué par plusieurs opérations militaires extérieures (Mali, Centrafrique, Irak, Syrie), fut également celui des pires attentats commis en France depuis la Libération (238 morts) : Charlie Hebdo, 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis, Nice le 14 juillet dernier.

La présidence de François Hollande en 10 dates

6 mai 2012: élection

Le socialiste François Hollande élu président avec 51,6 % des voix face au président sortant, de droite, Nicolas Sarkozy.

9 septembre 2012: chômage

Le chef de l'État s'engage à inverser la courbe du chômage « d'ici un an ». Par la suite, il lie sa candidature à un second mandat à l'objectif d'une inversion « durable ».

11 janvier 2013: Mali

Début de l'intervention française au Mali contre les groupes islamistes armés occupant depuis des mois le nord du pays. La France interviendra aussi en Centrafrique en décembre 2013.

19 mars 2013 : Cahuzac

Le ministre délégué au Budget Jérôme Cahuzac démissionne après avoir avoué détenir un compte caché à l'étranger. Après cette affaire, les ministres publient leur patrimoine et deux lois sur la transparence de la vie publique sont adoptées le 17 septembre.

23 avril 2013 : mariage gai

Adoption définitive de la loi autorisant le mariage et l'adoption pour les couples du même sexe après des mois de débats acharnés et d'importantes manifestations d'opposants.

10 janvier 2014 : Julie Gayet

Le magazine à potins Closer fait état d'une relation entre François Hollande et l'actrice Julie Gayet. Le 25 janvier, le président annonce « la fin de sa vie commune » avec sa compagne officielle Valérie Trierweiler.

31 mars 2014 : Valls

Jean-Marc Ayrault est remplacé à Matignon par Manuel Valls, au lendemain d'une défaite cinglante du parti socialiste aux municipales.

11 janvier 2015 : main dans la main

Plus de 3,7 millions de personnes marchent dans toute la France en solidarité après une série d'attaques djihadistes ayant visé l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, des policiers et des juifs. Le 11 janvier, Hollande défile solennellement dans la capitale aux côtés de plusieurs dirigeants étrangers comme le Britannique David Cameron, l'Allemande Angela Merkel ou l'Israélien Benyamin Nétanyahou.

13 novembre 2015 : attentats

De nouveaux attentats font 130 morts à Paris. François Hollande décrète l'état d'urgence et propose d'étendre la déchéance de nationalité aux bi-nationaux nés en France condamnés pour terrorisme. Faute de consensus, le projet est abandonné le 30 mars 2016, mais il aura provoqué le départ du gouvernement de la garde des Sceaux Christiane Taubira. Un nouvel attentat fait 86 morts le 14 juillet, à Nice. L'état d'urgence, prolongé à quatre reprises, court désormais jusqu'en janvier 2017.

20 juillet 2016 : loi Travail

Une réforme du droit du travail est adoptée après cinq mois de polémiques et de contestation sociale émaillée de violences. Le gouvernement aura dû recourir trois fois à une arme constitutionnelle pour y parvenir malgré l'opposition du Parlement.