Diane James est devenue vendredi la première femme à prendre la tête du parti anti-immigration Ukip, succédant à Nigel Farage, un des principaux artisans du vote des Britanniques en faveur du Brexit.

Cette députée européenne de 56 ans, quasiment inconnue du grand public, a été choisie par les militants de l'Ukip pour prendre les rênes d'un parti dont l'avenir est incertain après le retrait de son chef charismatique.

D'emblée, elle a placé la mise en oeuvre du Brexit au coeur des enjeux à venir.

Dans les 100 prochains jours, « je vais m'assurer que l'Ukip est une machine à gagner », mais, « tant que le document officiel de sortie de l'UE n'est pas signé, nous sommes toujours dans l'Union européenne », a-t-elle averti les militants réunis en congrès à Bournemouth, sur la côte sud de l'Angleterre.

Elle a ainsi appelé la première ministre Theresa May à offrir comme « cadeau de Noël à l'Ukip » l'activation de l'article 50 du traité de Lisbonne lançant la procédure de divorce avec l'UE.

Diane James a souligné que les prochaines élections législatives de 2020 seraient également « une priorité » pour l'United Kingdom Independence Party, devenu la troisième force politique du pays après avoir obtenu les suffrages de 3,8 millions de Britanniques (soit 12,6 %, mais un seul député) en 2015.

En fin de matinée, Nigel Farage, cofondateur de l'Ukip en 1993, a fait son ultime discours en tant que chef du parti europhobe sous les vivats d'une assemblée où les cheveux gris dominaient.

« Nous l'avons fait ! Nous avons fait tomber un premier ministre, nous nous sommes débarrassés du ministre des Finances (...) et d'un commissaire européen. Nous avons gagné la guerre et nous devons maintenant gagner la paix », a-t-il dit devant une foule conquise qui agitait des petits drapeaux britanniques et des affiches avec la photo de l'ancien courtier et les mots : « Chef d'État, merci ! ».

Il a appelé à ce que le parti soit « fort et en pleine santé » pour faire pression sur les conservateurs afin qu'ils mettent en oeuvre « un Brexit dur », sans accès au marché unique, et pour récupérer les électeurs travaillistes face à la déconfiture actuelle du Labour.

« Je vais soutenir le nouveau chef, je vais continuer à présider un groupe au Parlement européen et je compte voyager dans plusieurs capitales européennes pour tenter d'aider à l'indépendance et à la démocratie dans ces pays aussi », a-t-il annoncé.

Un parti « profondément divisé »

Si Diane James l'a emporté sans discussion face à cinq autres candidats, elle devra convaincre qu'elle constitue mieux qu'un choix par défaut.

Car la succession de Nigel Farage a connu son lot de turbulences, les personnalités les plus connues du parti n'étant soit pas candidat, soit pas au rendez-vous. « Je suis un nouveau visage, une nouvelle approche, donnez-moi une chance », a-t-elle dit en conférence de presse à l'adresse de tous les Britanniques.

Avant de se distinguer de Nigel Farage, qui a apporté son soutien à Donald Trump dans la course à la présidentielle américaine, en refusant de soutenir Hillary Clinton ou Donald Trump, jugeant qu'« aucun des deux candidats ne correspond à ce que veulent les Américains ».

Pour Matthew Goodwin, spécialiste de l'Ukip à l'Université du Kent et auteur d'« UKIP : Inside The Campaign », « l'avenir de l'Ukip demeure incertain ».

Pointant un parti « profondément divisé entre différentes factions », M. Goodwin a déclaré à l'AFP qu'en reprenant à son compte plusieurs réformes portées de longue date par l'Ukip comme celle des écoles publiques, Theresa May et son gouvernement ont « réduit l'espace politique » du parti populiste.

Illustration de ces difficultés, l'ancienne responsable des médias de Nigel Farage, Alexandra Phillips, a annoncé vendredi qu'elle quittait le parti pour rejoindre les conservateurs.

Ces récupérations politiques sont des « vols », a jugé Diane James, martelant qu'« on ne peut pas faire confiance aux conservateurs pour avoir un réel Brexit ».

Une sortie de l'UE qui, si elle ne se fait pas ou à moitié, donnera des « occasions à saisir » à l'Ukip pour « affirmer que la volonté du peuple a été ignorée », selon M. Goodwin.