Le demandeur d'asile syrien qui s'est fait exploser près d'un festival de musique dimanche soir en Allemagne avait prêté allégeance au groupe État islamique, commettant le deuxième attentat revendiqué par l'organisation jihadiste dans le pays en une semaine.

Le groupe EI a affirmé lundi que l'auteur de l'attentat à Ansbach (sud) était l'un de ses «soldats», selon l'agence Amaq, un organe de propagande de l'organisation extrémiste.

Sur une vidéo en arabe retrouvée sur le téléphone portable de ce Syrien, «il a explicitement annoncé (agir) au nom d'Allah, a fait allégeance (au chef du groupe EI), Abou Bakr al-Bagdadi (...) et annoncé expressément une vengeance contre les Allemands qui se mettent en travers de la voie de l'islam», avait indiqué auparavant à la presse le ministre régional de l'Intérieur de Bavière.

Le Parquet fédéral allemand, compétent en matière de terrorisme, a annoncé prendre en charge l'enquête et confirmé les soupçons concernant «la motivation islamiste de Mohammad D» qui transportait des explosifs dans son sac à dos avant de se faire exploser et de blesser 15 personnes, a-t-il indiqué dans un communiqué.

Il y a tout juste une semaine, un demandeur d'asile de 17 ans avait blessé cinq personnes à la hache dans la même région en se réclamant de l'EI.

Au lendemain de l'attentat suicide d'Ansbach, la police a découvert en perquisitionnant le  foyer pour migrants où le Syrien résidait divers matériaux et équipements «qui auraient pu permettre de construire d'autres bombes», a souligné le ministre de l'Intérieur bavarois.

L'auteur de l'attentat était arrivé en 2014, mais sa demande d'asile avait été rejetée il y a un an et il devait être expulsé vers la Bulgarie.

Séjours en psychiatrie

Il voulait s'en prendre à un festival de musique pop en plein air, auquel participaient plus de 2500 personnes.

«S'il avait réussi à rentrer dans l'enceinte, il y aurait eu certainement plus de victimes», a dit un responsable de la police locale.

Au-delà de la dimension djihadiste, les autorités pensent que l'état psychologique très fragile du demandeur d'asile a pu jouer un rôle. Le Syrien avait tenté par deux fois de mettre fin à ses jours et séjourné dans une clinique psychiatrique.

«Un lien avec le terrorisme international est aussi peu à exclure qu'une instabilité psychologique, ou une combinaison des deux», a estimé le ministre fédéral de l'Intérieur Thomas de Maizière. L'homme était originaire d'Alep et portait des blessures de guerre.

Le gouvernement a appelé à éviter les amalgames avec l'ensemble des migrants. «Nous ne devons pas porter de soupçon généralisé contre les réfugiés, même s'il y a des procédures qui sont engagées dans des cas isolés» contre eux, a affirmé Thomas de Maizière.

Le risque criminel représenté par les réfugiés dans le pays n'est proportionnellement «pas plus grand que dans le reste de la population», a renchéri la porte-parole adjointe du gouvernement, Ulrike Demmer.

Le gouvernement d'Angela Merkel redoute de voir l'appréhension de la population à l'égard des migrants, dont un nombre record est arrivé l'an dernier, redoubler suite aux événements des derniers jours: dans plusieurs cas des demandeurs d'asile sont impliqués.

Appels à plus de contrôles aux frontières

Cet attentat est survenu dans une phase de haute tension après une série de tragédies, et dans un contexte européen de crainte aigüe d'attentats djihadistes. C'est aussi la troisième fois en une semaine que l'État régional de Bavière est frappé.

Vendredi soir, un jeune forcené germano-iranien de 18 ans a tué neuf personnes à Munich en tirant dans la foule, mais ce drame n'est en rien lié à l'islamisme radical. Et, outre l'attaque à la hache, un demandeur d'asile syrien de 21 ans a tué dimanche à la machette une femme avec qui il venait de se disputer à Reutlingen (sud-ouest), un drame a priori passionnel.

Le pays est sous le choc. «Un attentat suicide au coeur de l'Allemagne!», s'exclamait lundi le quotidien Bild, le plus lu du pays. «La terreur islamiste a atteint l'Allemagne», affirmait en écho le ministre de la Justice de Bavière, Winfried Bausback. Le gouvernement s'est lui dit «bouleversé» par la série noire.

Des voix s'élèvent désormais pour réclamer un meilleur contrôle des entrées de migrants.

«Nous voyons en ce moment comment les états psychologiques fragiles, le terrorisme et la criminalité se mélangent», a dit le président du syndicat de policiers allemand, Rainer Wendt. Raison pour laquelle il faut vérifier en amont chez les migrants «s'ils représentent un danger», a-t-il ajouté.

«Nous n'avons pas été capables d'enregistrer et de contrôler tous les migrants qui ont franchi la frontière allemande», a renchéri un membre du parti conservateur CSU, Stephan Mayer.

REUTERS

Joachim Herrmann