L'élection présidentielle autrichienne qui avait porté au pouvoir un candidat écologiste devra être reprise, offrant à l'extrême droite une nouvelle chance de s'emparer de la tête du petit État européen.

Le contexte politique depuis le dénouement du scrutin, en mai dernier, a sensiblement évolué à l'échelle du continent en raison du référendum sur le retrait de la Grande-Bretagne et pourrait se faire sentir dans les urnes autrichiennes.

« C'est difficile de savoir exactement quel sera l'impact sur les chances des partis en lice. Les gens en Autriche sont choqués par le Brexit. Personne ne s'attendait à un tel dénouement », relève en entrevue le journaliste autrichien Norbert Mappes-Niediek, qui collabore avec plusieurs publications allemandes d'envergure.

Bien que le Parti autrichien de la liberté (FPÖ) et son candidat présidentiel, Norbert Hofer, critiquent régulièrement l'Union européenne, ils ne réclament pas que le pays s'en retire.

Un tel appel n'aurait aucun sens sur le plan économique, note M. Mappes-Niediek, puisque l'Autriche est « un petit pays de huit millions d'habitants enclavé au coeur de l'Europe » qui envoie 70 % de ses exportations vers l'Allemagne voisine.





Photo Ronald Zak, Associated Press

L’élection présidentielle autrichienne, qui oppose le candidat de droite Norbert Hofer au candidat vert Alexander Van der Bellen, doit être reprise en raison « d’erreurs administratives ».

Le candidat de la droite Norbert Hofer a tout de même prévenu, dans la foulée du référendum anglais, qu'il n'excluait pas de réclamer une telle consultation référendaire si Bruxelles évoluait « dans la mauvaise direction » et cherchait à centraliser de nouveaux pouvoirs.

Le candidat vert, Alexander Van der Bellen, plaide de son côté pour une tout autre approche, réclamant la création des « États-Unis d'Europe ».

Les plus récents sondages indiquent que la population autrichienne demeure largement acquise au maintien du pays dans l'UE.

Barbara Thériault, spécialiste des questions européennes rattachée à l'Université de Montréal, estime que le Brexit et la « peur » qu'il suscite pourraient en fait renforcer le sentiment d'attachement à l'Europe.

La campagne à venir risque encore une fois, du moins pour l'extrême droite, de porter sur la question des migrants, relève l'analyste. « C'est le thème sur lequel elle mise habituellement », relève Mme Thériault.

La question est sensible dans le pays, puisqu'une fraction importante des centaines de milliers de migrants qui sont arrivés l'année dernière en Allemagne, fuyant les conflits au Moyen-Orient, ont transité par l'Autriche. Des dizaines de milliers ont demandé l'asile dans le pays.



Fautes de procédure


La décision de reprendre le vote ne devrait pas en soi toucher plus un parti que l'autre, même si le FPÖ est à l'origine des plaintes qui ont poussé la Cour constitutionnelle à agir.

Selon M. Mappes-Niediek, des fautes de procédure relativement à la supervision du dépouillement des votes et au dévoilement des résultats ont entraîné le verdict. « Il s'agit d'erreurs administratives. Personne n'a évoqué de soupçons de fraude », relève le journaliste. Le nouveau scrutin doit avoir lieu en septembre ou en octobre.

Le résultat de l'élection sera suivi de près, tant en Autriche qu'en Europe, puisqu'une victoire du candidat du FPÖ représenterait un véritable « tremblement de terre », avance le journaliste Norbert Mappes-Niediek. 

Il s'agirait, note-t-il, de la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale qu'un pays d'Europe de l'Ouest décide « démocratiquement » de porter un représentant de l'extrême droite à la tête de l'État.

Le poste de président est d'abord symbolique, mais son occupant dispose du pouvoir de dissoudre le Parlement.

« L'Autriche créerait un précédent » avec une victoire du FPÖ à l'élection présidentielle, comme elle l'avait fait en 2000 lorsque le parti, sous la gouverne de Jörg Haider, était entré dans un gouvernement de coalition, précipitant l'adoption de sanctions par les autorités européennes.