La cellule djihadiste démantelée en janvier 2015 à Verviers (est de la Belgique), qui préfigurait les commandos qui ont commis les attentats de Paris et Bruxelles, disposait du matériel nécessaire à la fabrication d'une bombe, a-t-on appris à l'ouverture de son procès à Bruxelles.

Après l'assaut contre une maison de Verviers le 15 janvier 2015, accompagné de violents échanges de tirs, les forces de l'ordre ont découvert dans cette cache des armes, des munitions et des produits chimiques qui auraient pu servir à la fabrication de 4 kg de TATP, l'explosif artisanal ayant servi à Paris et Bruxelles, a expliqué lundi Pierre Hendrickx, le président du tribunal correctionnel de Bruxelles.

Le magistrat a détaillé minute par minute l'intervention des policiers, la riposte immédiate à la Kalashnikov des occupants de la maison, la mort de deux d'entre eux et l'interpellation de Marouane El Bali, le seul survivant de l'assaut.

Ce dernier a comparu lundi matin avec cinq autres prévenus, dans un Palais de justice sous haute surveillance après les attaques, revendiquées par le groupe État islamique (EI), qui ont fait 32 morts à l'aéroport et dans le métro de Bruxelles le 22 mars.

Neuf des accusés font en revanche défaut, se trouvant probablement en Syrie.

Arsenal létal

L'enquête avait été lancée à la mi-novembre 2014.

Les services belges s'inquiétaient alors du retour de Syrie d'un individu en contact avec les milieux islamistes radicalisés. Au fil des écoutes téléphoniques et des filatures, les enquêteurs découvrent des conversations «inquiétantes», un réseau d'hommes d'une extrême prudence, s'exprimant par messages codés.

«J'ai tout», explique l'un d'eux. «Tout est caché dans un entrepôt», ajoute un autre.

De quoi convaincre les enquêteurs qu'ils préparaient une attaque «imminente» contre les forces de l'ordre, comme l'a expliqué le parquet fédéral après l'assaut du 15 janvier 2015.

La police belge, qui avait reçu pour cette opération à risque le soutien du GIGN français, abattra Soufiane Amghar et Khalid Ben Larbi, qui se cachaient apparemment les armes à la main.

Cinq litres d'eau de javel, 15 litres d'acétone et douze litres de peroxyde d'hydrogène, qui permettent de fabriquer du TATP, l'explosif préféré de l'EI, mais aussi une guirlande électrique pouvant être transformée en détonateur, ont été retrouvés dans l'appartement.

Trois fusils d'assaut AK-47, quatre armes de poing, 200 à 300 cartouches et de quoi reconstituer des uniformes de police seront également saisis.

Abaaoud, chef de la cellule

Le grand absent de ce procès est Abdelhamid Abaaoud, soupçonné d'avoir joué un rôle central dix mois plus tard dans les attentats du 13 novembre 2015 à Paris (130 morts) et tué cinq jours plus tard lors d'un assaut policier à Saint-Denis (banlieue parisienne).

L'enquête a révélé que les protagonistes de la cellule étaient en contact téléphonique régulier avec un certain «Omar», qui utilisait des numéros de téléphone turcs puis grecs pour leur donner des ordres et qui sera identifié plus tard comme étant Abdelhamid Abaaoud, raison pour laquelle il est considéré comme le «chef» de la cellule.

En son absence, le principal protagoniste du procès doit être Marouane El Bali, 26 ans, le seul ayant survécu à l'assaut de Verviers, survenu une semaine après les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hyper Cacher à Paris.

Son avocat, Sébastien Courtoy, s'est employé à minimiser son rôle. Marouane El Bali «n'est arrivé dans le groupe que la veille de l'assaut, il n'a pas pu planifier d'attentat», a-t-il expliqué lundi aux journalistes.

À ses côtés figurent Omar Damache, un Algérien interpellé à Athènes à l'adresse où les policiers pensaient avoir localisé Abaaoud, Mohamed Arshad (qui était allé chercher en France et en Allemagne les deux djihadistes tués à Verviers), ainsi que Souhaib El Abdi et son frère Ismaël (qui comparaît libre), tous deux interpellés le lendemain de l'assaut de Verviers à la frontière franco-italienne.

Plusieurs des protagonistes de cette cellule sont originaires de Molenbeek (Bruxelles), comme Abaaoud et les frères Abdeslam, un trio au coeur des commandos des attentats de Paris.

M. Hendrickx n'a pas précisé les intentions présumées des prévenus. Selon le patron du GIGN, Hubert Bonneau, «leur idée était d'enlever une haute autorité belge et de la décapiter pour mettre les images sur les réseaux» sociaux.