L'Union européenne a décidé lundi de lever les sanctions qu'elle avait décrétées ces dernières années contre 170 personnalités biélorusses, dont le président Alexandre Loukachenko, pour l'encourager à faire davantage sur les droits de l'homme.

Les 28 ministres européens des Affaires étrangères, réunis à Bruxelles, ont adopté un texte donnant leur «accord au fait que l'UE ne prolongera pas ses mesures restrictives contre 170 individus et trois entreprises», privés de visas et dont les avoirs étaient gelés dans l'UE.

Toutes les sanctions édictées par Bruxelles contre la Biélorussie ne sont toutefois pas levées.

«L'embargo sur les armes et les mesures restrictives contre quatre individus listés en lien avec les disparitions non résolues de deux hommes politiques de l'opposition, un homme d'affaires et un journaliste, seront prolongés pour une période de douze mois», précise ce texte.

Le pays «montre une tendance positive que nous voulons encourager», a expliqué Mme Mogherini à l'issue de la réunion. «Ce n'est pas une image parfaite, et on n'essaie pas de la peindre en rose, mais nous sommes tombés d'accord sur un engagement critique» avec le pays, a-t-elle détaillé.

Le ministère biélorusse des Affaires étrangères a salué une «étape importante pour la normalisation de nos relations» qui «montre clairement que le dialogue est le moyen le plus efficace de résoudre les différences».

Le président biélorusse Alexandre Loukachenko, au pouvoir depuis 1994 et qualifié un jour par les États-Unis de «dernier dictateur d'Europe», avait été inscrit sur cette «liste noire» de l'UE en janvier 2011, après la répression violente qui avait suivi sa réélection fin 2010.

L'UE avait déjà suspendu fin octobre 2015 l'application de ces sanctions, en réponse à la libération à Minsk de prisonniers politiques que les Européens réclamaient de longue date, et au déroulement «dans un environnement exempt de violences» de l'élection présidentielle d'octobre 2015, invariablement remportée par M. Loukachenko.

Ces évolutions créent «une occasion pour que les relations entre l'UE et la Biélorussie se développent selon un agenda plus positif», selon le texte.

Exigences européennes

Ce virage des Européens envers la Biélorussie intervient alors que M. Loukachenko, accusé pendant des années de graves violations des droits de l'homme, de réprimer l'opposition et de museler la presse, a multiplié les signes d'ouverture en 2015.

Il a surtout habilement utilisé la crise ukrainienne à son avantage, s'imposant comme médiateur entre la Russie et l'UE ou accueillant à Minsk des pourparlers de paix entre Kiev et séparatistes prorusses.

Dans le texte adopté lundi, les Européens formulent toutefois plusieurs exigences. Ils demandent à Minsk de mettre en oeuvre une série de recommandations de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en vue des élections législatives prévues à l'automne.

«Les mesures tangibles prises par la Biélorussie pour respecter les libertés fondamentales universelles, l'État de droit et les droits de l'homme resteront la clé de voûte de la future politique de l'UE envers» ce pays, assure l'UE.

Le texte adopté lundi demande aussi que les anciens prisonniers politiques puissent retrouver leurs droits civils et politiques, une plus grande liberté de réunion et d'expression dans le pays. Il appelle les autorités biélorusses «à éliminer tous les obstacles aux médias libres et indépendants».

«Aux yeux des Européens, Loukachenko n'est plus un dictateur aussi affreux qu'avant, mais je voudrais souligner que sur le terrain rien n'a vraiment changé», a expliqué Ales Bialiatski, directeur du Centre Viasna pour les droits de l'homme de Minsk, dans une interview à l'AFP début février.

«Le régime est autoritaire, construit sur un système de type soviétique. Ces vingt dernières années, des milliers d'activistes ont été arrêtés et des centaines emprisonnés pour leur militantisme. La vie politique a été annihilée, les élections falsifiées. Espérer que ce régime changera de l'intérieur n'est pas réaliste», a-t-il regretté.