La commission électorale turque a proposé jeudi la tenue de législatives anticipées à l'automne pour doter la Turquie d'un gouvernement et sortir de l'impasse politique, alors que le pays s'enfonce dans une crise sécuritaire et économique.

Sans attendre la date butoir du 23 août pour la formation d'un gouvernement de coalition, la commission électorale turque a proposé la date du 1er novembre pour la tenue d'un nouveau scrutin, a annoncé jeudi l'agence officielle Anatolie.

Pour être validée, cette date doit encore être soumise aux partis politiques turcs, avant que le dernier mot ne revienne au Conseil constitutionnel.

Le premier ministre Ahmet Davutoglu avait informé mardi le président Recep Tayyip Erdogan de l'échec des négociations entre le Parti de la justice et du développement (AKP) et les partis d'opposition, sociaux-démocrates (CHP) et nationalistes (MHP), pour former un gouvernement de coalition.

L'AKP, parti islamoconservateur qui règne sans partage depuis 2002, a cherché en vain un partenaire pour gouverner, après avoir perdu sa majorité lors du scrutin du 7 juin.

Le premier ministre a appelé jeudi soir les leaders du CHP et du MHP à une ultime rencontre avant le 23 août.

À défaut d'un accord, le chef de l'État pourrait décider de la formation d'un gouvernement de transition, composé des représentants de chacun des partis qui siègent au Parlement.

Un mois de violence

Le leader nationaliste Devlet Bahçeli a demandé une réunion extraordinaire du Conseil de sécurité nationale pour l'instauration d'une loi martiale dans le sud-est du pays, à majorité kurde, et le report d'un nouveau scrutin.

«Autrement, nous allons faire face à une inévitable et sanglante guerre civile», s'est-il inquiété dans un communiqué.

Le pays vit au rythme de violences quotidiennes depuis l'attentat suicide de Suruç (sud) survenu le 20 juillet, dans lequel 33 jeunes proKurdes sont morts, et qui a été attribué à l'organisation État islamique (EI).

Ankara a lancé une «guerre contre le terrorisme» sur deux fronts visant en partie les djihadistes de l'EI et, essentiellement, les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qui ripostent.

Après la mort la veille de huit soldats turcs dans le sud-est du pays, l'armée turque a de nouveau bombardé le PKK dans la nuit de mercredi à jeudi.

En parallèle des frappes militaires, la police turque mène des coups de filet dans les milieux réputés proches de l'EI, du PKK ou de la mouvance de l'extrême gauche (DHKP-C).

La police antiterroriste a ainsi arrêté jeudi à Istanbul et Mersin (sud du pays) plus de 40 membres présumés du DHKP-C, qui ont revendiqué l'attaque survenue mercredi à Istanbul devant le palais de Dolmabahçe, où siègent les bureaux du premier ministre.

Appel au calme

Dans ce contexte agité, les investisseurs restent inquiets et se montrent prudents. Le premier ministre turc Ahmet Davutoglu a lancé un appel au calme évoquant une «réaction réflexe» après une nouvelle dégringolade jeudi de la monnaie turque face au dollar et à l'euro.

«Ce n'est pas le signe d'une crise structurelle durable. Il ne faut pas s'inquiéter», a-t-il estimé, cité par le journal Hürriyet.

La livre turque a inscrit un nouveau plus bas historique face au billet vert et à la monnaie européenne, s'échangeant brièvement à 3,0031 TL pour un dollar jeudi, selon les données fournies par l'agence Bloomberg.

La livre turque a baissé de 8% en un mois face au dollar, et de 24,8% depuis le début de l'année. L'euro s'est aussi fortement apprécié contre la livre et s'échangeait à 3,32 TL.