Quelque 200 000 spectateurs attendus en trois jours, 350 journalistes accrédités, une poignée de têtes couronnées et plus de 5000 figurants en uniformes: les manifestations organisées autour du 18 juin pour célébrer le bicentenaire de la bataille de Waterloo s'annoncent grandioses.

Préparée depuis des années, la commémoration se veut à la hauteur de l'importance de la confrontation sanglante qui a opposé le 18 juin 1815, à une vingtaine de kilomètres au sud de Bruxelles, l'armée impériale commandée par Napoléon aux forces alliées (britanniques, allemandes, belgo-hollandaises) du duc de Wellington et prussiennes du maréchal Blücher.

L'issue est connue: sur les près de 200 000 hommes (93 000 Français, 125 000 coalisés) qui se sont affrontés sur la plaine brabançonne, plus de 10 000 ont perdu la vie après une dizaine d'heures de combats, parfois au corps à corps, et 35 000 autres ont été blessés, dont plusieurs milliers allaient mourir dans les jours suivants.

Surtout, Waterloo marque la chute définitive de l'Empereur des Français, contraint à un exil sans retour sur l'îlot britannique de Sainte-Hélène, dans l'Atlantique Sud, après sa défaite face à une alliance de monarchies déterminées à mettre fin à plus de deux décennies de troubles et de guerres déclenchés par la Révolution française de 1789.

Au soir de Waterloo, la carte de l'Europe sera redessinée par les puissances victorieuses et le vieux continent vivra dans une paix relative pendant un siècle, jusqu'à la grande boucherie de 14-18.

Paris dépêche son ambassadeur

«L'idée est d'adresser à l'occasion de ce bicentenaire un message de réconciliation et d'union», confie-t-on auprès de la chancellerie du premier ministre belge Charles Michel, organisatrice d'une cérémonie protocolaire qui se tiendra sur le champ de bataille jeudi 18 juin à 11H00 (09H00 GMT), au moment où, 200 ans plus tôt, les premiers boulets s'échappaient des gueules des canons français en direction des lignes britanniques.

Au pied de la butte surmontée d'un lion construite sur le champ de bataille, la cérémonie réunira, autour du roi des Belges Philippe et de la reine Mathilde, le couple royal des Pays-Bas, les grands-ducs du Luxembourg, un représentant de la famille royale britannique (le prince Edward, cousin d'Elizabeth II), ainsi que des descendants des principaux belligérants.

La veille, le prince Charles et son épouse Camilla auront assisté à l'inauguration après rénovation de la ferme d'Hougoumont, position avancée protégeant l'aile droite des Alliés qui fut le cadre de combats meurtriers durant la bataille.

Paris, après avoir tenté en vain de s'opposer à l'émission d'une pièce de monnaie commémorative, de crainte qu'elle «engendre une réaction défavorable en France», sera représenté par son ambassadeur en Belgique. Tout comme l'Allemagne, en dépit du rôle crucial joué à Waterloo par les Prussiens pour renverser l'Aigle impérial.

«La plus grande reconstitution napoléonienne»

Le bicentenaire a donné lieu en Belgique à une profusion de publications --ouvrages scientifiques, bandes dessinées-- et d'événements, ainsi qu'à la création d'une nouvelle bière.

Complets depuis longtemps malgré les 60 000 places prévues, les spectacles programmés trois soirs de suite sont les plus attendus.

Jeudi, un spectacle son et lumière baptisé «Inferno» fera revivre sur les lieux mêmes de la bataille les célèbres vers du poème «L'expiation» de Victor Hugo, «Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine !».

Jeudi, plus de 5000 figurants en costumes d'époque, 360 chevaux et 100 canons prendront part à la reconstitution des premières phases de la bataille, «l'Attaque française», tandis que vendredi, ils rejoueront le dénouement, «la Riposte alliée».

«Ce sera la plus grande reconstitution de l'ère napoléonienne jamais réalisée dans le monde», a expliqué à l'AFP Étienne Claude, responsable de l'organisation d'un événement dont le budget dépasse les 10 millions d'euros.

Napoléon sera joué par un avocat parisien, Frank Samson, qui porte le bicorne depuis une dizaine d'années avec le plus grand sérieux. «À Waterloo, j'amène la tente impériale, meublée, avec toute la vaisselle, dans une remorque», a-t-il confié récemment à l'AFP. Les hommes de troupe, eux, dormiront dans des bivouacs.

Le site de Waterloo, qui s'est offert pour l'occasion un tout nouveau «centre des visiteurs», espère que ce coup de projecteur permettra de faire du champ de bataille, longtemps négligé, un haut lieu du tourisme mémoriel.