Un proche déjà marié du dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov a épousé une jeune fille de 17 ans au cours d'une cérémonie très médiatisée samedi, au mépris de la loi russe qui interdit la polygamie.

Âgé de 47 ans, le chef de la police locale Najoud Goutchigov avait obtenu la bénédiction personnelle de Ramzan Kadyrov pour épouser Louisa Guoïlabieva, 17 ans, tout en précisant qu'il n'avait pas l'intention de divorcer de sa première épouse.

Pénétrant dans le Zags (office d'état civil où sont enregistrés les mariages) de Grozny au bras du chef du gouvernement tchétchène Magomed Daoudov, la jeune fille semblait complètement abattue, au point de se faire répéter trois fois la question «Voulez-vous épouser Najoud Goutchigov?», avant d'acquiescer du bout des lèvres, a constaté une journaliste de l'AFP sur place.

L'immense cortège a ensuite rejoint un restaurant de Grozny, la capitale tchétchène, où Ramzan Kadyrov était présent et a fait des démonstrations de danses traditionnelles.

Interrogés par l'AFP, plusieurs invités à la cérémonie ont désapprouvé cette union, se disant plus scandalisés par la différence d'âge entre les deux époux que par les accusations de bigamie.

«J'aurais tué ma fille plutôt que la laisser se marier comme ça. Je suis contre les mariages précoces», a déclaré sous couvert d'anonymat une femme assistant à la cérémonie.

Annoncé fin avril, ce mariage a provoqué un tollé en Russie, de nombreux médias affirmant que la jeune fille avait été forcée d'épouser Najoud Goutchigov.

La déléguée pour les droits de l'homme auprès du Kremlin, Ella Pamfilova, a critiqué au micro de la radio indépendante Echo de Moscou «des pratiques moyenâgeuses», disant espérer que «ce mariage n'aura pas lieu» et appelant à des sanctions dans le cas contraire.

«Ces publications ne sont que des mensonges! L'amour n'a pas d'âge», a répliqué sur son compte Instagram Ramzan Kadyrov, qui dirige d'une main de fer cette petite république du Caucase russe depuis 2007.

Le responsable des droits des enfants auprès du Kremlin, Pavel Astakhov, a pour sa part affirmé n'avoir trouvé aucune infraction à la loi dans ce mariage. «Aucun crime n'a été commis et les accusations selon lesquelles l'âge minimum légal n'est pas respecté sont fausses», a-t-il déclaré vendredi sur son compte Instagram.

Ni Ramzan Kadyrov ni Pavel Astakhov n'ont répondu aux accusations de polygamie.

Ramzan Kadyrov, l'homme fort de république du Caucase russe, théâtre de deux guerres sanglantes avec la Russie en 1994-1996 et dans les années 2000, est un défenseur de longue date de cette pratique.

Considéré comme un protégé de Vladimir Poutine, qui l'a placé à la tête de la Tchétchénie, il prend de plus en plus de distances avec le pouvoir central russe. Fin avril, il avait ainsi demandé à ses troupes de «tirer pour tuer» tout soldat russe n'ayant pas l'autorisation de se trouver sur le territoire tchétchène.

Les organisations et militants pour les droits de l'homme accusent régulièrement Ramzan Kadyrov d'exactions et de semer la terreur en Tchétchénie, ainsi que d'avoir instauré le culte de sa personnalité et de celle de son père, président de la Tchétchénie jusqu'à sa mort en 2004.