La Turquie a condamné vendredi les propos des présidents russe Vladimir Poutine et allemand Joachim Gauck qualifiant de «génocide» le massacre de centaines de milliers d'Arméniens par l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale.

«Nous rejetons et nous condamnons la qualification des événements de 1915 en génocide par le président russe Poutine, malgré nos avertissements et nos appels», a écrit dans un premier communiqué le ministère turc des Affaires étrangères.

Lors des cérémonies du centenaire du génocide organisées vendredi à Erevan, M. Poutine a affirmé que «rien ne peut justifier des massacres de masse», et parlé de «génocide».

«De telles déclarations politiques constituent une violation du droit et sont considérées comme nulles et non avenues par la Turquie», a déploré Ankara, qui a reproché à la Russie ses «pratiques inhumaines visant les peuples turcs et musulmans» au cours de son histoire, sans autre détail.

«Nous pensons que la Russie est probablement la mieux placée pour savoir ce qu'est un +génocide+ et ce que recouvre cette dimension juridique», a insisté le ministère turc.

Dans une autre déclaration, il s'en est ensuite pris aux propos du président allemand Joachim Gauck, qui a reconnu pour la première fois un génocide arménien et souligné la «coresponsabilité» dans son crime de son pays, allié de l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale.

«Il n'a aucun droit d'accuser la Nation turque d'un crime qu'elle n'a pas commis», a estimé Ankara.

«L'histoire et l'identité turques sont une part indissociable de la société turco-allemande. Les membres de cette communauté ne resteront pas silencieux face aux tentatives de remettre en cause cette identité. Le peuple turc n'oubliera et ne pardonnera pas les déclarations du président Gauck», a poursuivi le ministère.

L'Allemagne abrite la plus importante communauté turque à l'étranger, évaluée à quelque trois millions de personnes.

Et dans un dernier communiqué, la Turquie a également critiqué le président américain Barack Obama, qui a soigneusement évité de recourir au mot génocide mais a parlé de «grand carnage». «Nous rejetons toute conception discriminatoire et partiale de la justice», a indiqué le ministère turc des Affaires étrangères, dénonçant le «point de vue unilatéral» défendu par le président américain.

Depuis plusieurs jours, la Turquie dénonce systématiquement les déclarations qualifiant de génocide les massacres de centaines de milliers d'Arméniens perpétrés par l'Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale, ou qui la pressent de le reconnaître.

Les dirigeants islamo-conservateurs turcs ont une nouvelle fois présenté vendredi leurs «condoléances» aux familles des victimes arméniennes de 1915 en reconnaissant leurs «souffrances», mais sans admettre le caractère organisé et systématique de ces tueries.