Cinq millions d'euros (plus de 6,5 millions de dollars) de bijoux : c'est le butin hors du commun d'un vol à la portière commis mercredi sur l'autoroute reliant l'aéroport de Roissy à Paris, phénomène récurrent sur cette porte d'entrée des visiteurs étrangers en France contre lequel la police peine à lutter.

Le forfait a été commis mercredi après-midi alors que le taxi à bord duquel se trouvait une collectionneuse d'art taïwanaise résidant en Allemagne, circulait dans le Tunnel du Landy, peu avant l'entrée dans la capitale française, selon une source proche de l'enquête.

Trois personnes brisent la vitre du véhicule, s'emparent du sac à main de la victime et prennent la fuite à pied par une issue de secours. Jackpot : le sac contient pour 5 millions d'euros de bijoux de la maison Chanel. Jeudi, la police les cherchait toujours.

Parmi les joyaux, glissés dans son sac à main aux côtés de ses affaires personnelles et de ses papiers d'identité, se trouvait notamment une bague dont la valeur est estimée à 1,7 million d'euros (plus de 2,2 millions de dollars).

Attaque préméditée ou énorme «coup de chance» pour de petits délinquants? Toutes les hypothèses restent ouvertes pour les enquêteurs spécialisés de la brigade de répression du banditisme (BRB), un service parisien habitué des gros coups, braquages de bijouterie ou vol d'oeuvres d'art par exemple.

Mais plusieurs agressions d'automobilistes se sont déjà produites sur l'autoroute reliant l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle à Paris, et à la sortie nord de Paris, par des groupes parfois bien organisés.

Des précédents

Si le butin de mercredi est exceptionnel, le mode opératoire est banal : le Tunnel de Landy, où le vol a été perpétré, est le plus fréquenté d'Europe selon les autorités, avec «plus de 220 000 véhicules par jour». Ce tronçon d'autoroute de 1300 mètres est un passage quasi obligé pour les personnes qui ont atterri à Roissy.

Les voleurs s'attaquent aux cibles les plus évidentes : automobiliste distrait qui téléphone, imprudent qui laisse son sac sur le siège passager, mais aussi voitures luxueuses coincées dans les embouteillages, ou touristes étrangers qu'ils supposent transporter d'importantes sommes en liquide. Les voleurs ciblent des berlines de luxe et savent que des touristes lestés de devises circulent à bord de taxis et, parfois, des voitures diplomatiques.

Les embouteillages «empêchent tout mouvement» des victimes, et la circulation dense interdit souvent aux policiers de se lancer dans une poursuite, trop périlleuse, des voleurs.

À pied ou en scooter, parfois à contre-sens au milieu des voitures, «une équipe peut faire 10, 20, 30, voire 100 victimes», décrivent les autorités. Il s'agit selon elles d'une délinquance souvent locale. «Ils n'ont peur de rien, connaissent le terrain et s'échappent via les issues de secours».

En février 2010, Christina Chernovetska, la fille du maire de Kiev de l'époque, avait été victime d'un vol similaire à celui de mercredi, dans le même secteur. Un sac contenant selon elle des bijoux, des bagues et des boucles d'oreilles pour un montant de 4,5 millions d'euros (5,9 millions de dollars) avait été volé.

D'autres agressions sont plus sophistiquées. En août 2014, un commando d'hommes armés avait braqué le convoi d'un prince saoudien, lui dérobant 250 000 euros (environ 328 000 $) et des documents diplomatiques, alors qu'il s'engageait sur le boulevard périphérique parisien pour se rendre par cette même autoroute à l'aéroport du Bourget, à 15 km au nord de Paris.

En juillet 2013 un officiel saoudien s'était fait lui aussi voler près de 200 000 euros (260 000 $) lors d'un contrôle de police factice. Les voleurs avaient équipé leurs deux voitures de gyrophares et portaient des brassards avec la mention «police», ainsi qu'une arme de poing.