Un infirmier allemand, jugé depuis plusieurs mois, a reconnu avoir tué une trentaine de patients gravement malades et hospitalisés en soins intensifs, selon un expert entendu jeudi pendant une audience au procès.

Niels H., 38 ans, est jugé depuis septembre devant le tribunal d'Oldenbourg (nord) pour les meurtres de trois patients et pour tentatives de meurtre sur deux autres patients, auxquels il aurait injecté des surdoses de médicaments tandis qu'ils étaient en soins intensifs.

Mais, au-delà de ces cinq cas, cet ancien infirmier, déjà condamné en 2008 pour une tentative de meurtre sur un autre patient, était soupçonné d'être responsable de nombreux autres homicides qui ne pouvaient toutefois lui être formellement reprochés, faute de charges.

Jeudi, son procès a donc connu un énorme rebondissement, avec le témoignage de l'expert psychiatre qui l'a examiné à quatre reprises, en décembre et janvier derniers.

Devant le tribunal, le spécialiste a expliqué que, à la faveur de ces examens, l'accusé lui avait avoué une trentaine d'homicides par overdoses médicamenteuses lorsqu'il était employé dans une clinique de Delmenhorst, non loin d'Oldenbourg, selon des propos reproduits par l'agence de presse allemande DPA, et confirmés à l'AFP par une porte-parole du tribunal.

Légalement, il ne s'agit toutefois pas d'aveux puisque l'accusé n'a pas fait directement ces déclarations devant le tribunal, a toutefois insisté cette dernière auprès de l'AFP.

Selon le psychiatre, l'infirmier a aussi confié avoir administré des surdoses médicamenteuses à une soixantaine d'autres patients qui, quant à eux, ont survécu.

«Honte»

L'homme a fait part à son psychiatre de sa profonde «honte» face à des actes dont il affirme ne pas totalement se souvenir. Niels H. a reconnu que ses actes n'étaient pas excusables, se disant conscient d'avoir causé une grande souffrance aux proches des victimes, a encore raconté l'expert.

Jusqu'à présent, l'accusé, qui ne s'est pas exprimé devant le tribunal, ne s'était pas vraiment épanché sur ses mobiles, invoquant avoir voulu jouer «par ennui» avec la vie des patients.

De leur côté, les enquêteurs et le parquet le soupçonnent d'avoir voulu démontrer ses talents en matière de réanimation, amenant les patients près de la mort avant de tenter par la suite de les ranimer.

L'affaire avait débuté à l'été 2005, lorsqu'il avait été surpris par une collègue au moment où il injectait à un patient un médicament pour le coeur. Trois ans plus tard, en 2008, il avait été condamné à sept ans et demi de prison pour tentative de meurtre. Il est incarcéré depuis.

Pendant sa détention, l'infirmier se serait toutefois vanté auprès d'un codétenu d'avoir tué une cinquantaine de patients. Du coup, en janvier 2014, le parquet d'Oldenbourg avait repris l'enquête, qui s'est donc poursuivie au cours du procès actuel, ouvert en septembre.

En novembre, une cellule spéciale d'enquêteurs baptisée «Kardio» avait été constituée afin d'enquêter sur les décès suspects à l'intérieur d'établissements dans lesquels avait travaillé l'accusé, comme dans un foyer pour personnes âgées à Wilhelmshaven (nord) et à la clinique d'Oldenbourg.

Fin novembre, une expertise conduite en interne par la clinique d'Oldenbourg, où Niels H. a également été employé, avait ainsi conclu à douze cas de morts suspectes entre 1999 et 2002 au sein de cet établissement. Ces patients, gravement malades, étaient pris en charge dans l'unité de soins intensifs dans laquelle exerçait Niels H.

Pour l'heure, on ignore pourquoi ces multiples homicides n'ont pas été décelés plus tôt. Une procédure a été déclenchée par le parquet général d'Oldenbourg contre deux procureurs précédemment chargés de l'enquête afin de déceler d'éventuelles négligences.

Le parquet enquête également à la clinique de Delmenhorst afin de déterminer si la responsabilité de l'infirmier pouvait être mise en cause dans d'autres décès.