Elle aura eu une vie très courte, mais un enterrement très bruyant. Hier enfin, après trois jours de controverse en France autour du lieu de son inhumation, le tout petit cercueil blanc de Maria Francesca a été mis en terre dans la ville voisine de celle où habitent ses parents, d'origine rom. Quatre citations pour résumer cette histoire qui déchire la France.

 

Dans le journal Le Parisien de samedi, le maire de Champlan, une banlieue au sud de Paris (à côté de l'aéroport d'Orly), a expliqué ainsi pourquoi il n'avait pas autorisé l'inhumation d'un bébé de deux mois et demi dans le cimetière municipal. Maria Francesca est morte dans la nuit du 25 au 26 décembre du syndrome de la mort subite du nourrisson. Ses parents sont des Roms du bidonville de Champlan, installés depuis huit ans en France. Devant l'indignation, le maire Leclerc est revenu sur ses propos dimanche pour invoquer désormais une «erreur administrative». Trop tard: une enquête préliminaire pour «discrimination» a été ouverte.

Les propos du maire de Champlan ont soulevé une vague d'indignation parmi la population et les politiciens. Le premier ministre Manuel Valls a évoqué «une injure» à la «mémoire» du bébé. Même la présidente du Front national, Marine Le Pen, qui prône ouvertement le démantèlement des camps et le renvoi des clandestins, a dit à France Info qu'elle-même aurait accepté l'inhumation. «Mais évidemment! C'est une erreur de la part de ce maire qui est dramatique, c'est un défaut d'humanité.»

Lors des obsèques, un conseiller d'Europe Écologie Les Verts, Jacques Picard, s'est confié à un journaliste de 20 minutes. «Il est important de rappeler les valeurs de la République. Où va-t-on aujourd'hui? De quel droit un maire refuse l'inhumation d'un nourrisson de deux mois? C'est révélateur d'un climat général délétère.» Ses propos rejoignent ceux qu'avait eus le président François Hollande la veille dans une entrevue à France Inter. Il a dit refuser que la France «s'en prenne à l'autre comme ça s'est passé dans [ce] cimetière». Le pays connaît «depuis longtemps» une crise identitaire «grave», a souligné le chef d'État, qui a appelé à défendre les valeurs de la République et du modèle social français face au «doute».

La cérémonie a donc finalement eu lieu dans une église catholique à Massy, à côté de Champlan, et l'enterrement dans le cimetière de Wissous, à quelques mètres de l'aéroport d'Orly. Sur les ondes de France Info, le prêtre Gatineau n'est pas le seul à s'indigner. «On ne les laisse pas vivre, mais on ne les laisse pas mourir non plus», dit Saïmir Mile, président de l'association La voix des Roms. Environ 20 000 Roms vivent actuellement en France.