Le gouvernement espagnol a adressé mardi une fin de non-recevoir à l'exécutif catalan qui souhaite négocier avec Madrid un référendum d'autodétermination pour la région, estimant avoir été conforté par un vote symbolique qui a attiré 2,3 millions de personnes.

«Le droit à l'autodétermination que vous demandez n'est pas possible, ni dans cette Constitution ni dans aucune des démocraties voisines», a déclaré avec force la vice-présidente Soraya Saenz de Santamaria, en réponse à une question qui lui était posée au Sénat, à Madrid, deux jours après ce scrutin.

«Ne cherchez pas à négocier sur la souveraineté des Espagnols (...). Si ce que vous voulez c'est l'indépendance de la Catalogne, alors il sera difficile que nous parvenions à un accord», a-t-elle ajouté, à l'adresse du sénateur Josep Lluis Cleries, de la coalition nationaliste CiU au pouvoir dans cette région du Nord-Est de l'Espagne.

«Ni ce parti, ni ce gouvernement ne donneront leur voix à un accord de sécession».

À la mi-journée, le président de l'exécutif catalan Artur Mas a annoncé qu'il avait adressé une lettre au chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy pour lui proposer la mise en place d'un «dialogue permanent».

Considérant que le vote du 9 novembre avait été un «point culminant» après les importantes mobilisations de citoyens catalans favorables à l'autodétermination, il a appelé M. Rajoy à ne pas «ignorer la réalité», «têtue».

M. Mas a donc renouvelé son souhait d'obtenir l'organisation en Catalogne d'un véritable référendum d'autodétermination, comme il l'exige depuis un an. Madrid n'a jamais laissé le moindre espoir à cette possibilité, estimant que seul l'ensemble des Espagnols est en droit de se prononcer sur l'avenir de l'une des 17 régions espagnoles.

Législatives 

«Ce que nous avons entre les mains ne peut se résoudre qu'avec de la haute politique et un sens de l'État», a argumenté M. Mas.

Dimanche, 2,3 millions de personnes ont participé à un vote consultatif sur l'indépendance, qui en principe n'aurait pas dû avoir lieu car le Tribunal constitutionnel l'avait suspendu à la demande de Madrid. La plupart étaient des sympathisants de la cause indépendantiste, et 1,8 million d'entre eux se sont prononcés pour l'indépendance.

Cependant, près de la moitié de la population catalane ne souhaite pas l'indépendance, selon les sondages.

Au-delà des mots, les deux camps ont semblé se laisser du temps pour affiner leur réponse et leurs stratégies.

Le procureur général de l'État Eduardo Torres Dulce a ainsi fait savoir qu'il prendrait son temps pour décider s'il y avait lieu d'ordonner des poursuites en liaison avec la consultation de dimanche, organisée par l'exécutif catalan en dépit de son interdiction par le tribunal.

«Les temps de la justice ne sont pas ceux des politiques ni des médias», a-t-il dit.

M. Mas a également annoncé qu'il prendrait plusieurs semaines pour affiner sa stratégie, toujours tendue vers un seul objectif : le droit à l'autodétermination.

«Peut-être que nous n'aurons pas le choix et qu'il faudra des élections», a-t-il concédé, n'écartant pas complètement d'organiser des régionales anticipées - les prochaines devaient avoir lieu en 2016 - au cours desquelles les partis se positionneraient exclusivement pour ou contre l'indépendance.

«Dans les prochains jours, je convoquerai un cycle de discussions avec les formations politiques catalanes» favorables au référendum et au droit à décider, a-t-il annoncé.

L'objectif, a-t-il ajouté, sera d'écouter les propositions et de voir quel est le degré de «consensus» sur le recours à des élections.

Selon l'analyste José Antonio Zarzalejos, ancien directeur du journal conservateur ABC, ce scrutin anticipé sera probablement la prochaine étape, en février au plus tard, car il faut au moins 55 jours entre deux scrutins et des élections municipales sont déjà prévues en mai.

En attendant, «il n'y aura aucun mouvement à Madrid», a-t-il assuré en considérant que le gouvernement attendra de voir quel est le véritable rapport de forces sur le terrain.

Il a en outre estimé qu'il n'y aurait aucune avancée concrète avant les prochaines élections législatives, prévues dans un an : «Rajoy ne donnera rien car son électorat (conservateur NDLR), ne le lui pardonnerait pas». La «solution n'interviendra qu'au cours de la prochaine législature», a-t-il assuré.