Le premier ministre David Cameron a exhorté l'Écosse à «préférer l'ouverture à l'étroitesse» jeudi à Glasgow où il est venu vanter le «marché unique britannique» et la sauvegarde du Royaume-Uni à trois semaines d'un référendum d'autodétermination.

Le chef de file conservateur a prononcé au cours du dîner annuel du patronat local un vibrant plaidoyer en faveur de la survie d'une union créée il y a 307 ans et qui comprend aujourd'hui l'Angleterre, l'Écosse, le Pays de Galles et l'Irlande du Nord.

«Ce sont des opportunités économiques qui ont uni nos nations en 1707. Trois cents ans plus tard, notre destin et notre richesse sont toujours étroitement liés», a-t-il déclaré, citant ensuite les quatre «grands avantages» de l'union propices au commerce : «les perspectives qu'elle offre, la stabilité, la solidarité et la taille».

Il s'agit «d'un des marchés uniques les plus anciens et les plus réussis du monde», a-t-il souligné, en faisant remarquer que «l'Écosse a deux fois plus d'échanges  commerciaux avec le reste du Royaume-Uni qu'avec l'ensemble du reste du monde».

«Préférons l'ouverture à l'étroitesse. Nos grands atouts à la grande incertitude. Et restons ensemble», a lancé le premier ministre, qui, avant de rencontrer les patrons, a été plutôt fraîchement accueilli dans une ville où ni lui, ni son parti conservateur ne sont très populaires.

«David Cameron n'est pas le bienvenu en Ecosse car ici on ne vote pas conservateur», a résumé Samuel Cook, étudiant favorable à l'indépendance, qui protestait devant l'hôtel hébergeant le dîner annuel du patronat.

Le 18 septembre, 4,2 millions d'électeurs résidant en Écosse sont appelés aux urnes, pour dire s'ils veulent transformer en un pays indépendant cette région septentrionale dotée d'une certaine autonomie.

Le parti conservateur et son allié libéral-démocrate au gouvernement militent ardemment pour le «non» à l'indépendance aux côtés des travaillistes, pilier de l'opposition à Londres, mais d'accord pour maintenir l'intégrité de l'union.

Le Parti travailliste est traditionnellement plus puissant que les «tories» en Écosse, terre ancrée à gauche, et c'est l'un des siens, l'ancien ministre des Finances Alistair Darling, qui dirige la campagne unioniste «Better together».

C'est également cet Écossais au profil de technocrate qui a porté la contradiction au premier ministre de la région écossaise et champion du camp de la sécession, le volubile Alex Salmond, pendant les débats télévisés.

«Judas, ordure»

Les enjeux économiques sont en effet au coeur des arguments : les indépendantistes certifient qu'un État ayant Édimbourg pour capitale serait plus proche des firmes locales et mieux à même de manier les leviers budgétaires, tandis que les unionistes dénoncent les zones d'ombre autour de la future monnaie et de l'adhésion à l'Union européenne d'une Écosse sortie du giron britannique.

Président du CBI, le patronat écossais, Mike Rake a ainsi rappelé jeudi l'«énorme risque» que constitue, à ses yeux, une sortie de l'Écosse du Royaume-Uni.

Même si les sondages accordent une douzaine de points d'avance aux partisans du maintien de l'union, les Écossais se passionnent pour l'enjeu et la participation au vote pourrait être massive.

Un haut responsable travailliste à Londres, l'Ecossais Douglas Alexander, a averti qu'au lendemain du vote l'un des défis serait de «rassembler l'Écosse» aujourd'hui divisée.

Sur la BBC Radio Scotland, M. Alexander s'est fait traiter de «putain de menteur» par un auditeur qui lui reprochait de dénier à l'Écosse indépendante le droit d'utiliser la livre sterling.

«Sur les réseaux sociaux, j'ai été traité de Judas et d'ordure», a déploré M. Alexander.

Un autre homme politique écossais actif à Londres, le ministre de l'Écosse, Alistair Carmichael (libéral-démocrate), a averti pour sa part qu'il pourrait quitter le gouvernement britannique si la région choisissait le «oui».

Au-delà du monde politique, le débat fait rage au sein de la communauté d'affaires écossaise. Quelque 200 patrons, chefs de petites entreprises pour la plupart, mais aussi gros bonnets, ont ainsi publié une pétition pour l'indépendance dans le journal The Herald.

Il s'agissait d'une réponse du berger à la bergère après la publication, mercredi, d'une lettre de 130 patrons écossais opposés à la sécession en raison de l'incertitude «nuisible aux affaires» qui en résulterait et «des liens économiques très forts au sein du Royaume-Uni (qui) assurent près d'un million d'emplois en Écosse».