Le pape François a invité dimanche dans sa «maison» au Vatican les présidents Shimon Peres et Mahmoud Abbas à prier avec lui pour la paix, dans le contexte difficile d'une crise profonde de confiance entre Israéliens et Palestiniens.

Au retour d'un pèlerinage au Proche-Orient fin mai, le pape avait tenu à clarifier son dessein devant les journalistes alors que les spéculations s'amplifiaient sur l'amorce d'une médiation du Vatican.

«Peut-être ne me suis-je pas bien expliqué... Cette rencontre de prière ne sera pas pour une médiation ou pour chercher des solutions. Nous nous réunissons pour prier, c'est tout. Et après, chacun reviendra chez soi», avait-il dit.

Dimanche 25 mai, à Bethléem, devant une foule de fidèles, François avait annoncé qu'il conviait MM. Peres et Abbas à «faire monter ensemble avec lui une prière intense en invoquant de Dieu le don de la paix». «J'offre ma maison, au Vatican», avait-il lancé.

Informés en amont de cette initiative les deux présidents s'étaient rapidement déclarés disponibles.

Le mandat de M. Peres s'achève en juillet, et le Prix Nobel de la paix a une marge de manoeuvre étroite après avoir été désavoué en 2011 par le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, pour avoir tenté de mener des négociations secrètes avec Mahmoud Abbas.

Cette prière a lieu dans un contexte particulièrement délicat, M. Abbas ayant formé un nouveau gouvernement soutenu par le mouvement radical palestinien Hamas, ennemi juré d'Israël, qui s'estime «trahi» par tous les alliés qui le reconnaissent.

À cela s'ajoute l'arrêt impromptu du pape pour prier devant le mur de séparation, regretté du côté israélien.

Pour la rencontre de prière qui pourrait se tenir dans les jardins du Vatican, les deux chefs d'État devraient être accompagnés de rabbins et d'imams, et par le patriarche oecuménique de Constantinople, Bartholomée, déjà présent avec le pape en Terre Sainte.

Appel à la paix

Dans un communiqué publié jeudi soir, le bureau de M. Peres a précisé que le pape, le chef de l'État israélien et le président Abbas lanceraient «un appel conjoint à la paix aux peuples du monde entier».

«Le président Peres mettra un accent particulier sur l'importance du dialogue interreligieux», précise le communiqué prenant soin de souligner que «l'événement aura lieu dans le jardin dépourvu de symboles religieux et qui n'est pas un endroit de prière pour garantir qu'il sera conforme à la tradition juive».

Selon l'agence Ansa, la prière pourrait être suivie ou précédée d'un entretien.

Dans l'avion qui le ramenait de Jérusalem à Rome, interrogé sur l'avenir de Jérusalem, le Pape avait reconnu que le Saint-Siège avait son «point de vue religieux» mais qu'il n'était pas «compétent» sur le plan politique: «les mesures concrètes pour la paix doivent sortir de la négociation (...) À dire vrai, je ne me sens pas compétent pour dire: il faut qu'on fasse cela ou cela. Parce que ce serait une folie de ma part!»

L'insistance à souligner qu'il ne s'agit pas d'une médiation n'exclut pas que la diplomatie vaticane puisse se mobiliser. L'idée est que la prière puisse amener les protagonistes à reprendre le chemin du dialogue, d'autant que le secrétaire d'État Pietro Parolin est un grand connaisseur du dossier israélo-palestinien.

La diplomatie vaticane a plusieurs succès à son actif comme la médiation entre le Chili et l'Argentine en 1978 sur le litige du canal de Beagle. Jean XXIII avait aussi contribué à désamorcer la crise des missiles à Cuba, entre États-Unis et URSS, en 1962.

En septembre, François avait eu l'idée d'une «journée mondiale de prière et de jeûne pour la paix» en Syrie, au moment où les États-Unis et la France pensaient à des frappes aériennes contre le régime de Bachar al-Assad.

La démarche de François vise à montrer que les trois religions monothéistes ont des racines communes et doivent s'entendre pour la paix sur une terre sacrée pour elles trois. C'est ainsi qu'il a déposé la prière du «Notre Père» dans le Mur des Lamentations, et qu'il a donné l'accolade devant ce mur à un rabbin et à un professeur musulman.

En Italie et en Argentine notamment des moments de prière ont été annoncés en solidarité avec la rencontre au Vatican.