Avec la victoire de l'UKIP lors des élections européennes britanniques, le référendum sur une éventuelle sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne apparaît inéluctable. Et un vote en sa faveur apparaît désormais possible.

Nigel Farage jubilait à l'annonce des résultats. Même si les derniers sondages donnaient son parti vainqueur, il lui fallait confirmer dans les urnes. Avec 27,5 % des votes, soit 11 points de pourcentage de mieux qu'en 2009, le Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (UKIP) a rempli son objectif. Son score aurait pu être plus important puisque 1,5 % des électeurs ont sans doute voté par mégarde pour un parti indépendantiste totalement inconnu, mais qui figurait en tête des bulletins de vote, Une Indépendance de l'Europe.

Pour la première fois depuis 1906, un autre parti que les conservateurs et les travaillistes a remporté un scrutin national. Et Nigel Farage n'a pas tardé à en établir les conséquences : « Nous risquons bien de voir un leader de parti forcé de démissionner, un autre reconsidérer sa politique d'opposition au référendum sur l'Europe et [le premier ministre] David Cameron sera obligé de prendre une approche bien plus dure dans ses négociations. »

Balayage

Les très pro-européens libéraux-démocrates ont en effet été balayés. Ils ont perdu la moitié de leur soutien populaire en cinq ans (6,87 %) et dix de leurs onze parlementaires européens. Nombre de leurs candidats appellent désormais à la démission du dirigeant de la formation, Nick Clegg, même si cette issue est peu vraisemblable à un an de l'élection générale : personne ne se risquera à aller au massacre à sa place.

Le leader travailliste Ed Miliband a annoncé mi-mars qu'il n'organiserait de référendum sur l'Europe qu'en cas de nouveaux transferts de pouvoirs vers Bruxelles. Une situation qu'il estimait lui-même « improbable ». Sa faible avance vis-à-vis des conservateurs (+1,46 point de pourcentage avec 25,40 %) dans cette élection européenne et la victoire de l'UKIP vont sans doute l'obliger à revoir sa position. Sans quoi le report partiel des voix UKIP lors de l'élection générale de l'an prochain se dirigera fortement vers les conservateurs et rendra la victoire du Labour peu probable.

Ce reniement ne serait pas exceptionnel : son prédécesseur Tony Blair avait longtemps tenu un discours similaire avant de céder à la pression populaire et de promettre en 2004 un référendum - qui n'eut jamais lieu. Mais les analystes sont formels : si un référendum est organisé pendant que les travaillistes sont au pouvoir, ces derniers rallieront contre eux les eurosceptiques et les mécontents de leur politique ; la sortie du pays de l'UE serait alors quasiment inéluctable. Cet immense risque explique la position d'Ed Miliband.



Sur les épaules de Cameron

Aussi étonnant que cela puisse paraître, le maintien du Royaume-Uni au sein de l'Union européenne repose donc sans doute sur les épaules de David Cameron, celui-là même qui a provoqué le chaos actuel en promettant un référendum sur une sortie de l'Union européenne en 2017 en cas de réélection l'an prochain. Il devra pour cela négocier avec Bruxelles un réel rapatriement des pouvoirs européens vers Londres. Cette possibilité est rendue crédible par la probable nomination de Jean-Claude Juncker à la présidence de la commission européenne : l'ancien premier ministre luxembourgeois a en effet assuré fin avril qu'en cas de succès il « travaillerait pour un accord juste pour le Royaume-Uni ». Dans ce cas, David Cameron posséderait les arguments nécessaires pour faire tourner le vote en faveur d'un maintien dans l'UE. Si son parti décide de faire campagne en faveur de cette option, ce qui n'est pas encore certain.