La présidente sortante de la Lituanie, Dalia Grybauskaite, était en passe de remporter dimanche soir son second mandat au 1er tour de l'élection présidentielle, tirant les fruits de sa fermeté à l'égard du grand voisin russe dans la crise ukrainienne.

Selon une estimation du chef de la commission électorale nationale, Zenonas Vaigauskas, la participation au scrutin était de l'ordre de 52 % ou 53 %, soit au-dessus de la barre de 50 % nécessaires pour que la «dame de fer» balte, grande favorite de cette élection, puisse être reconduite à son poste dès le premier tour.

Aucun sondage n'a été donné à la fermeture des bureaux de vote à 20 h locales (13 h au Québec), si bien qu'il fallait attendre les résultats officiels pour laisser entrevoir la victoire de Mme Grybauskaite, «probable, mais pas encore assurée», selon les analystes.

«Malgré une campagne terne, la participation a été élevée, très probablement parce que les électeurs étaient rendus inquiets par l'agression russe en Ukraine», a déclaré à l'AFP Kestutis Girnius, analyste à l'Université de Vilnius.

«La présidente Grybauskaite a pris soin de se présenter comme une femme politique en meilleure position pour défendre la Lituanie. Nombre d'indécis ont finalement décidé de voter pour elle», a-t-il ajouté.

Cette présidentielle a coïncidé avec une montée de l'inquiétude, suscitée en Lituanie par les agissements de la Russie et sa puissance militaire grandissante aux frontières de cette ex-république soviétique.

Lors de la campagne électorale, Mme Grybauskaite n'avait pas mâché ses mots en se déclarant «prête à prendre elle-même les armes pour défendre le pays si la sécurité nationale le nécessitait».

«L'avenir de la Lituanie dépend de la décision que chaque citoyen lituanien prend aujourd'hui», a-t-elle affirmé en mettant dimanche son bulletin dans l'urne.

La présidente sortante a accueilli fin avril en Lituanie des troupes américaines, alors que l'OTAN renforce sa présence dans les pays baltes qui ont passé cinquante ans sous occupation soviétique jusqu'en 1991, avant de rejoindre en 2004 l'OTAN et l'UE.

«Elle ne retient pas ses coups»

Célibataire, ceinture noire de karaté, cette ancienne commissaire européenne au Budget est connue pour son franc-parler.

«Elle ne retient pas ses coups, elle s'exprime ouvertement et elle sait quels sont les intérêts de la Lituanie», a expliqué à l'AFP Judy Dempsey, analyste chez Carnegie Europe.

Parmi ses principaux rivaux figuraient le député européen social-démocrate Zigmantas Balcytis et le député travailliste Arturas Paulauskas.

Ils ont fait campagne sur les questions sociales, s'engageant à combattre le chômage et la corruption. Contrairement à Mme Grybauskaite, ils ont plaidé en faveur d'un dialogue avec Moscou.

«Nous devons nouer un dialogue avec la Russie. N'importe quel genre de paix est préférable à une guerre», a insisté M. Balcytis.

Mme Grybauskaite avait fermement soutenu le programme d'austérité quand la Lituanie avait basculé dans la crise en 2009, et elle a plaidé pour l'adoption de l'euro en 2015.

La présidente sortante n'est affiliée à aucun parti, mais elle est soutenue par les principaux partis d'opposition, les conservateurs et les libéraux, qui ont perdu les élections en 2012 au profit des sociaux-démocrates.

Née à Vilnius sous l'ère soviétique, Mme Grybauskaite a fait ses études à Léningrad, l'actuel Saint-Petersbourg, tout en travaillant dans une usine de pelleterie.

Elle a par la suite enseigné l'économie dans une école du parti communiste à Vilnius.

Avec le retour de ce pays balte à l'indépendance, elle a entamé une carrière dans l'administration lituanienne, notamment au ministère des Affaires étrangères.

Vice-ministre des Finances puis vice-ministre des Affaires étrangères entre 1999 et 2001, elle a été ministre des Finances de 2001 à 2004. Et quand la Lituanie a rejoint l'UE en 2004, elle été nommée commissaire européenne.

Polyglotte, elle parle anglais, russe, polonais et français, en plus de sa langue maternelle, le lituanien.