La ministre française de la Francophonie, Yamina Benguigui, est soupçonnée d'avoir menti sur sa déclaration de patrimoine, a annoncé lundi une instance administrative indépendante qui a transmis son dossier à la justice.

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a relevé «un doute sérieux quant à l'exhaustivité, l'exactitude et la sincérité» des déclarations de la ministre, réélue dimanche conseillère municipale à Paris.

La période visée porte sur 2012, 2013 et 2014. S'ils sont confirmés, les manquements de la ministre sont passibles de trois ans de prison, 45 000 euros (68 000 $) d'amende et dix ans d'inéligibilité.

Cette affaire survient alors que bruissaient lundi des rumeurs sur un remaniement gouvernemental imminent après l'échec retentissant de la gauche aux élections municipales en France.

Ces dernières semaines, Yamina Benguigui, 59 ans, avait été accusée par plusieurs médias de fausse déclaration, ce qu'elle a «démenti formellement». Lundi en milieu d'après-midi, aucun commentaire n'avait pu être obtenu auprès de la ministre sur les déclarations de la Haute Autorité.

Cette Haute Autorité pour la transparence de la vie publique a été créée en 2013 à la suite de fausses déclarations de l'ancien ministre du Budget Jérôme Cahuzac, affirmant qu'il n'avait pas de compte bancaire en Suisse. Cette affaire avait provoqué une tempête politique au sein du gouvernement de gauche et conduit à la démission de ce ministre, pourfendeur à son poste des fraudes fiscales et qui a finalement admis avoir possédé un compte à l'étranger.

Cette autorité indépendante est responsable de l'examen des déclarations d'intérêts et de patrimoine de plusieurs milliers d'élus et hauts fonctionnaires en France, rendues obligatoires par une loi adoptée en octobre 2013.

Selon plusieurs médias français, la ministre aurait omis de déclarer lors de sa déclaration de patrimoine en avril 2013 qu'elle détenait des actions dans une société anonyme de droit belge, G2. La vente en janvier 2014 de ses parts lui aurait rapporté 430 000 euros (654 000 $), selon l'hebdomadaire Marianne, qui se fonde sur un document enregistré au greffe de Bruxelles.

La ministre affirme avoir vendu ces parts en février 2013 pour un euro, mais ajoute qu'«à la suite d'une préconisation de l'administration fiscale», elle a dû modifier l'opération de cession de ses parts et que c'est en janvier 2014 que les parts ont été finalement cédées.

Selon la Haute Autorité, Mme Benguigui aurait même dû déclarer ces parts dès 2008 quand elle est devenue adjointe à la mairie de Paris, même si cela n'était pas un délit à l'époque.

Yamina Benguigui, réalisatrice notamment de documentaires sur des communautés immigrées en France, était entrée au gouvernement du premier ministre Jean-Marc Ayrault en mai 2012 avec la responsabilité au ministère des Affaires étrangères de la Francophonie et des Français de l'étranger. Un mois plus tard, lors d'un remaniement après des législatives, elle avait perdu cette deuxième fonction pour ne garder que la première.