L'opposant ukrainien torturé Dmytro Boulatov, soigné dans un hôpital lituanien, a déclaré jeudi devant la presse que ses tortionnaires russophones l'avaient forcé d'avouer qu'il était un espion américain.

«Ils m'ont forcé de parler devant une caméra en me faisant dire tout ce qu'ils voulaient : que j'étais un espion américain (...), que l'Amérique m'a donné de l'argent pour Maïdan (place de la contestation à Kiev), et que j'ai été inspiré par les Américains pour créer les désordres contre notre gouvernement», a déclaré M. Boulatov aux journalistes à l'hôpital de Vilnius où il était arrivé de Kiev dimanche pour un traitement médical.

«Quand ils m'ont battu, je sentais sur mon visage quelque chose comme du métal fondu, très, très chaud. J'étais prêt à n'importe quoi pour qu'ils s'arrêtent», a-t-il dit.

«Je me suis dit qu'ils devaient être des membres des services spéciaux russes. À la façon dont ils m'ont battu, j'ai conclu que c'étaient des professionnels», a-t-il ajouté.

Militant très actif contre le président Viktor Ianoukovitch, Dmytro Boulatov, 35 ans, a raconté que ses tortionnaires russophones l'avaient torturé avec les yeux cachés pendant plusieurs jours dans une pièce, dans une localité non identifiée.

«Ils m'ont cloué à une porte en bois, agenouillé, et ils m'ont frappé avec des bâtons», a-t-il poursuivi lors d'une conférence de presse d'une heure et demi.

«J'étais tellement effrayé, tellement souffrant de douleur, que je leur ai demandé de me tuer», a-t-il dit.

Le ministère lituanien des Affaires étrangères avait affirmé mardi que Boulatov «portait sur son corps des traces évidentes de longues tortures et d'un traitement cruel».

Le cas de Dmytro Boulatov, enlevé selon son récit le 22 janvier et relâché dans une forêt le 30, est devenu emblématique de la répression contre les critiques du régime ukrainien.

Il a été autorisé à se rendre à l'étranger pour recevoir des soins médicaux à la suite des pressions des Occidentaux, choqués par les images du militant ensanglanté, qui ont fait le tour du monde.

La Lituanie, qui a offert un traitement médical gratuit aux opposants ukrainiens blessés, a souhaité mardi que l'UE demande une enquête indépendante sur la «torture» en Ukraine.

L'affaire Boulatov s'ajoute à d'autres passages à tabac et enlèvements d'opposants, dont un mortel, survenus au cours du mouvement de contestation sans précédent qui secoue le pays depuis plus de deux mois.