Le pape François a appelé mardi à une réforme de l'Église à tous niveaux vers plus de collégialité, préconisant «une conversion de la papauté» et se disant «ouvert aux suggestions» pour un exercice de son ministère plus conforme à l'Évangile.

Dans l'exhortation Evangelii Gaudium («La joie de l'Évangile»), premier document important du magistère de François, celui-ci écrit : «je dois penser à une conversion de la papauté. Il me revient, comme évêque de Rome, de rester ouvert aux suggestions orientées vers un exercice de mon ministère qui le rende plus fidèle à la signification que Jésus-Christ entend lui donner, et aux nécessités actuelles de l'évangélisation».

Il préconise collégialité et décentralisation, affirmant qu'il veut développer «un statut des conférences épiscopales», à qui il veut donner plus d'autorité, y compris «doctrinale».

Le texte, qui ne contient pas d'infléchissements doctrinaux, est concentré sur l'évangélisaton, rôle, insiste-t-il, de tous les catholiques. Il donne des orientations à la suite de l'assemblée synodale d'octobre 2012 sur la Nouvelle évangélisation, mais, plus largement, livre le programme et les idées personnelles du pape.

François critique longuement le «système économique mondial», dénonçant «exclusion et disparité sociales» et consacrant de larges passages à la pauvreté, à l'obligation des fidèles et des prêtres d'aller vers les pauvres, à la piété populaire.

«Tant que ne s'éliminent pas l'exclusion sociale et la disparité sociale, dans la société et entre les divers peuples, il sera impossible d'éradiquer la violence. On accuse les pauvres (...) de la violence, mais, sans égalité de chances, les différentes formes d'agression et de guerre trouveront un terrain fertile qui tôt ou tard provoquera l'explosion», prévient-il.

Il dénonce la traite des êtres humains : «beaucoup ont les mains qui ruissellent de sang à cause d'une complicité confortable et muette».

Le pape François «implore humblement» les pays musulmans d'assurer la liberté religieuse aux chrétiens, «prenant en compte la liberté dont les croyants de l'islam jouissent dans les pays occidentaux».

Sept ans après le tollé causé dans le monde musulman par des propos de Benoît XVI à Ratisbonne (Allemagne) semblant lier islam et violence, le pape François s'inquiète d'«épisodes de fondamentalisme violent», mais invite aussi à éviter «d'odieuses généralisations», «parce que le véritable islam (...) s'oppose à toute violence».

Le pape invite à confier des responsabilités aux femmes, mais rappelle que «le sacerdoce réservé aux hommes est une question qui ne se discute pas».

«On ne doit pas s'attendre à ce que l'Église change de position» sur la défense des enfants à naître, affirme par ailleurs François sans citer le mot avortement.

«Les enfants à naître sont les plus sans défense et innocents de tous, auxquels on veut nier aujourd'hui la dignité humaine», écrit-il.

Le pape évoque la légitimité de la «liberté» dans l'Église des recherches sur «d'innombrables questions», évoque «la miséricorde», la relativité de la responsabilité dans le péché, et semble ouvert à un accès plus souple aux sacrements.