La justice grecque a inculpé lundi et placé en détention un couple de Roms pour l'«enlèvement» d'une mystérieuse fillette dont la découverte a provoqué des milliers d'appels de parents ou de proches à la recherche d'enfants disparus.

La découverte de cette enfant blonde aux yeux verts, qui serait âgée de quatre à six ans, mercredi lors d'un contrôle de routine de la police dans un camp rom de la ville de Farsala, près de Larissa (centre), a provoqué une vive émotion, en Grèce et à l'étranger.

L'enfant vivait avec le couple incriminé qui s'est avéré, après des examens ADN, n'avoir aucun lien de parenté avec elle. Il s'agit d'un homme de 39 ans et d'une femme de 40 ans.

L'inculpé a affirmé lors de sa déposition devant un juge d'instruction de Larissa que l'enfant leur avait été confiée, alors qu'elle venait de naître, par un Rom bulgare et la mère de l'enfant, également membre de la communauté rom, selon l'agence de presse grecque Ana.

Le couple a également été inculpé «de constitution de faux papiers», a indiqué un des avocats du couple, Me Kostas Katsavos, précisant qu'il s'agit d'un faux certificat de naissance de l'enfant déposé à la mairie d'Athènes.

À l'extérieur du tribunal, une trentaine de membres de la communauté rom ont attendu la décision des juges, durant plusieurs heures, sans faire de déclarations, a constaté une journaliste de l'AFP.

La diffusion par la police des photos de la fillette, vendredi, a déclenché un déluge d'appels et de courriels à l'association de protection des mineurs «Sourire de l'enfant», à laquelle les autorités ont confié la petite fille.

«Dimanche soir, nous avions reçu plus de 8 000 appels et des milliers de courriels», a déclaré à l'AFP Panagiotis Pardalis, un des responsables de l'association. Le site internet de l'association a reçu selon lui plus de 200 000 visites, et son site Facebook environ un demi-million.

«Les appels proviennent soit de familles (qui ont connu une disparition d'enfant) soit de personnes sans lien avec ces dernières. Nous transférons ces appels à la police», a souligné M. Pardalis.

Des parents grecs d'enfants disparus ont aussi apporté aux autorités des résultats de tests ADN pour les comparer à ceux de l'enfant, selon la presse locale. L'agence Ana cite le cas d'un couple qui a perdu un enfant à la naissance, en 2009, mais dont le corps ne leur a pas été remis.

Mandat international

Les autorités sont pour le moment incapables d'expliquer comment l'enfant est arrivée aux mains de ce couple de Roms.

La fillette, qui répond au prénom de Maria, serait âgée de quatre ans, a indiqué la police, mais des médias locaux affirment qu'elle en aurait cinq ou six.

Surnommée «l'ange blond» par la presse, elle faisait lundi la une des journaux grecs, pour la troisième journée consécutive.

Elle apparaît sur des clichés de la police vêtue d'un jogging froissé, avec de fines nattes dans une coiffure désordonnée. Sur une autre photo, chevelure peignée, elle esquisse un léger sourire.

«Combien encore de tels regards?», s'interrogeait Ta Néa, le plus gros tirage grec, avec un zoom sur les yeux de l'enfant.

La police a quant à elle lancé «des recherches dans toutes les directions», a indiqué à l'AFP la Direction de la police de Larissa, afin d'éclaircir cette affaire. Elle réexamine des cas de trafics d'enfants avec les pays limitrophes de la Grèce, dont la Bulgarie.

Un mandat international a été lancé, et Interpol effectue des recherches, a-t-on précisé de source policière.

En 2011, alors que le trafic de bébés bulgares était en pleine expansion, une opération conjointe de la police des deux pays avait abouti à l'arrestation de dix Bulgares et deux Grecs, accusés d'avoir acheminé en Grèce 17 femmes bulgares enceintes, pour vendre ensuite leurs nouveau-nés.

Les intermédiaires empochent de 15 000 à 20 000 euros par enfant, dans de telles opérations réalisées entre la Bulgarie et la Grèce, selon des enquêteurs grecs cités par l'agence Ana.

Le trafic de bébés est facilité en Grèce par des lacunes dans la législation sur le régime d'adoption, en particulier lorsqu'il s'agit d'enfants étrangers, relèvent des experts.