La grande coalition entre sociaux-démocrates et conservateurs en Autriche accuse le revers le plus cuisant de son histoire lors des élections législatives de dimanche en raison d'une montée de l'extrême droite, mais devrait se maintenir au pouvoir, selon de premières estimations.

Selon des estimations des instituts ARGE et SORA, les sociaux-démocrates du SPÖ arrivent en tête (26,4% à 26,7%) des suffrages, soit environ trois points de moins qu'il y a cinq ans. Son traditionnel allié gouvernemental, le Parti populaire (ÖVP, démocrate-chrétien), perd plus de deux points (23,6 à 23,8%).

Les deux grands partis du centre devraient néanmoins pouvoir reconduire un gouvernement de coalition: selon SORA, ils rassembleraient 97 sièges sur les 183 que compte le Conseil national, la chambre basse du parlement autrichien.

Le scrutin est marqué par la forte progression du principal parti d'extrême droite FPÖ, qui gagne plus de quatre points (21,9 à 22,4%).

Le FPÖ de Heinz Christian Strache, qui a prêché «l'Amour du prochain» - à condition qu'il s'agisse d'Autrichiens -, était fortement remonté dans les sondages, profitant d'une campagne terne et clientéliste des deux grands partis. «HC», comme il aime se faire appeler, avait promis «un miracle bleu», la couleur du FPÖ, lors de ces élections.

Si ces estimations sont confirmées, le SPÖ et l'ÖVP enregistreraient leur plus mauvais score depuis l'avènement de la 2e République, après l'effondrement en 1945 de la dictature nazie, alors que les Autrichiens ont privilégié depuis 68 ans les alliances entre ces deux formations, gage de stabilité dans le pays.

«Nous nous réjouissons de former le prochain gouvernement», a néanmoins réagi le chef de campagne du SPÖ, Norbert Darabos, sur la télévision publique ORF.

L'équipe menée par le chancelier social-démocrate sortant Werner Faymann, dont ce sera le second mandat, peut se targuer d'un bon bilan économique, avec un taux de chômage contenu sous les 5%. Mais les nombreux scandales de corruption de ces dernières années et les querelles internes synonymes de paralysie des réformes ont lourdement pesé sur sa popularité.

La surprise «NEOS» et les Verts au plus haut de leur histoire

Le milliardaire austro-canadien eurosceptique Frank Stronach récolte de son côté 5,6% à 6%, alors qu'il était crédité de 12% il y a un an. Le fondateur du géant mondial de l'équipementier automobile Magna s'est décrédibilisé au cours de la campagne par ses surprenantes suggestions, notamment le rétablissement de la peine de mort pour les tueurs professionnels, la création d'un euro différent pour chaque pays ou son évocation d'une invasion de l'Autriche par la Chine.

Le nouveau petit parti libéral «NEOS», pro-européen et soutenu par l'industriel autrichien du bâtiment Hans Peter Haselsteiner, crée de son côté la sensation en réussissant à passer la barre des 4% nécessaires pour entrer au parlement (4,7 à 4,9%).

En revanche, le parti fondé à la suite d'une scission du FPÖ par le charismatique dirigeant populiste Jörg Haider, décédé dans un accident de voiture en 2008, échoue sous cette barre (3,3 à 3,7%) et est donc éliminé du parlement alors qu'il avait encore obtenu 10,70% en 2008.

Les Verts, auteur d'une efficace campagne anti-corruption, enregistrent le meilleur score de leur histoire avec 12% des suffrages selon ARGE, mais en dessous des sondages qui les créditaient de 14 à 15%.

Quelque 6,4 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes pour élire les 183 députés de leur Conseil national, la chambre basse du parlement. La participation devrait avoir baissé de deux points, après 78,82% en 2008.