À cinq jours des législatives allemandes, la faiblesse des Libéraux menace plus que jamais l'actuelle coalition d'Angela Merkel et les sociaux-démocrates semblent déjà se préparer à gouverner avec elle.

«Il reste moins d'une semaine avant les élections, et déjà le SPD distribue les postes - dans une grande coalition», comme celle de 2005 à 2009 -, écrivait mardi le quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung, qui détaillait déjà les réflexions sur ce que pourraient réclamer les sociaux-démocrates : six postes de ministres - trois hommes, trois femmes -, avec Sigmar Gabriel, l'actuel président du SPD, aux fonctions de vice-chancelier.

Le scénario d'une «grande coalition» des conservateurs (CDU/CSU) et des sociaux-démocrates était appuyé mardi par un sondage de l'institut Forsa pour l'hebdomadaire Stern.

La CDU/CSU d'Angela Merkel y était toujours créditée d'une large avance, avec 39% des intentions de vote. Mais elle n'aurait pas la majorité absolue avec son partenaire libéral (FDP), en baisse d'un point, à 5%, soit tout juste le seuil nécessaire pour avoir des députés au parlement.

Alors que les conservateurs profitent de la très grande popularité de Mme Merkel, le FDP est plombé par «une direction relativement peu sympathique, des querelles de personnes et des erreurs (politiques) faites en début de législature», explique à l'AFP Siegmar Schmidt, politologue de l'Université de Landau.

Le SPD, inchangé à 25%, ne semblait pas affecté par la polémique qui a agité l'Allemagne en fin de semaine dernière autour d'une photo de son candidat, Peer Steinbrück, faisant un doigt d'honneur.

Ce dernier n'a cependant jamais réussi à tenir tête à Mme Merkel, ayant commis plusieurs impairs dès le début de sa campagne, en septembre 2012.

Quant aux alliés traditionnels du SPD, les Verts, ils se maintiennent à leur bas niveau de 9%, loin des 15% encore atteints au printemps. Leur faute a été de faire l'essentiel de leur campagne sur un terrain déjà occupé par les autres partis de gauche : celui de la justice sociale.

Une grande coalition «est naturellement la constellation la plus probable qui serait aussi acceptée par les électeurs», a estimé Richard Hilmer, directeur de l'institut de sondage Infratest dimap, dans un entretien avec Inforadio.

Lundi soir, Mme Merkel a émis un signal sans ambiguïté : elle n'aidera pas son petit partenaire libéral qui n'est plus représenté que dans neuf parlements régionaux sur 16, après une série de débâcles électorales. «Nous n'avons pas de voix à donner», a-t-elle lancé.

Les caciques du FDP avaient auparavant appelé les sympathisants de droite à partager leurs votes entre la CDU/CSU et les libéraux pour sauver la coalition au pouvoir. Aux législatives allemandes, les électeurs ont deux voix, l'une pour un député, l'autre pour un parti, et peuvent les répartir à leur guise.

Mais la démarche n'est pas du goût des conservateurs qui verraient leur propre score baisser.

«Si les conservateurs et les Libéraux ne parviennent pas à obtenir la majorité (absolue), alors la CDU/CSU veut faire le plein de voix dimanche pour être la plus forte possible avant d'entamer les négociations de coalition» avec le SPD, souligne M. Hilmer.

Le SPD semble de plus en plus ouvert à l'idée d'une «grande coalition». Son candidat Peer Steinbrück a d'ailleurs annoncé qu'il était prêt à mener en personne les négociations pour former un tel gouvernement, bien que lui-même ne souhaite pas en faire partie.

«Les sociaux-démocrates ont actuellement la majorité (absolue) au Bundesrat - chambre haute du parlement allemand, représentant les régions -, ils seraient sur un pied d'égalité avec les conservateurs s'ils parvenaient à obtenir entre 27 et 29% des voix dimanche», a estimé Frank Decker, politologue de l'Université de Bonn.

Avec le moyen de pression que constitue le Bundesrat - qu'il ne contrôlait pas entre 2005 et 2009 -, le SPD aurait sans doute davantage de marge de manoeuvre pour imposer aux conservateurs des projets qui lui tiennent à coeur, comme celui de salaire minimum, a-t-il ajouté.