Des fresques de couleurs vives qui décorent les murs des maisonnettes de Bodvalenke attirent des touristes dans ce petit village du nord-est de la Hongrie, à forte majorité rom et donc objet de préjugés à connotation raciste.

«L'idée de base de notre projet est très simple: nous faisons venir des artistes peintres d'origine rom pour faire des fresques sur les murs des maisons et cela dans le but, d'une part, de lutter contre les préjugés anti-roms très répandus ici et, d'autre part, de combattre la pauvreté insupportable qui sévissait dans ce village afin d'aider les gens à s'en sortir», a expliqué à l'AFP Eszter Pasztor, 55 ans, à l'initiative du projet lancé en 2009, géré par une fondation soutenue par l'Église réformée.

Le village rom se trouve près de la frontière slovaque, dans un coin pittoresque de la Hongrie. Cette région était le centre de l'industrie lourde sous le communisme avant 1990, mais, depuis, elle est caractérisée par la misère, le chômage et des tensions ethniques.

Près de la totalité des habitants de Bodvalenke sont des Roms, qui représentent aussi la minorité ethnique la plus importante du pays avec quelque 500 000 personnes, soit près de 6% de la population.

L'eau courante n'est pas encore accessible partout dans le village et la majorité de ses habitants vit d'aides sociales.

L'initiative artistique d'Eszter Pasztor semble toutefois donner une lueur d'espoir aux villageois.

Avec l'assistance du secteur privé et même une contribution de l'État, 29 fresques resplendissantes de couleurs vives illuminent les murs des maisons autrement ordinaires du village.

Le projet est né grâce à un voyage en Égypte. En Nubie, Eszter Pásztor est allée dans un village qui attirait des touristes grâce à des peintures murales. Elle a transposé cette initiative en Hongrie: «Je pensais que cela pouvait marcher en Hongrie aussi».

Les oeuvres illustrent des personnages provenant des contes et de la mythologie rom, inspirés par leur culture, musique et mode de vie.

L'année dernière, 3500 touristes ont visité Bodvalenke, avec un pic en juillet, au Festival du Dragon, qui en est à sa quatrième édition.

Pendant le festival, des guides locaux expliquent en détail les symboles et les informations contenues dans les fresques: «C'est très important d'apprendre à connaître cette culture et toute cette abondance de couleurs, aussi bien à travers les plats, les gens, les ambiances et bien sûr les fresques sur les maisons qui nous racontent de très belles histoires. Elles ont un symbolisme tout à fait particulier que nous ne connaissons que très peu et qu'ici on nous fait découvrir», a expliqué le touriste Peter Boros, qui habite dans les environs et a amené toute sa famille.

Comme le village ne possède pas d'infrastructure touristique, pas d'hôtel, ni de restaurant, les habitants préparent nourritures et boissons pour les touristes.

«Je gagne autant d'argent par la vente de mes gâteaux les fins de semaine que toute mon allocation sociale», a raconté à l'AFP Katalin Egri, une villageoise de 55 ans.

«Chaque année, nous avons cette fête du Dragon et plusieurs autres fêtes organisées dans notre village et beaucoup de gens viennent nous rendre visite, cela nous fait gagner de l'argent. Avant ce n'était qu'un village simple», a-t-elle ajouté.

Les gens ont plus d'espoir et sont désormais «fiers de leur village», selon elle.

Mais, pour Eszter Pasztor, les véritables gagnants de ce projet sont les enfants: les progrès sont déjà visibles à l'école, l'assiduité et les résultats scolaires des enfants se sont nettement améliorés, a-t-elle indiqué. «Les enfants voient le résultat du travail et de la créativité. Avec les personnes talentueuses qui affluent dans le village, je pense que beaucoup d'entre eux ont été inspirés», a-t-elle souligné.