Le Portugal restait confronté jeudi au risque de replonger dans le flou politique après le soutien en demi-teinte accordé au gouvernement par le président, qui a défendu un compromis droite-gauche assorti d'élections législatives anticipées dans un an.

En raison de cette incertitude, le Portugal a sollicité et obtenu de ses créanciers le report de leur prochain examen trimestriel du plan d'aide international accordé à ce pays en mai 2011.

La huitième évaluation de la «troïka» composée par la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international devait débuter lundi prochain, mais le ministère portugais des Finances a annoncé jeudi soir que «la réalisation des huitième et neuvième examens est prévue pour la fin août, début septembre».

Dans une déclaration à la nation mercredi, le président Anibal Cavaco Silva a assuré que la coalition de centre droit, au pouvoir depuis juin 2011, était en mesure d'exercer «la plénitude de ses fonctions», mais il a appelé à la construction d'un gouvernement «de salut national» soutenu par l'opposition socialiste.

Le chef de l'État a également préconisé des élections législatives anticipées en 2014, à la fin du plan d'aide international de 78 milliards d'euros que le Portugal a obtenu en juin 2011, en échange d'un programme de réformes et de rigueur.

Mais, dans le même temps, il a exclu que des élections anticipées puissent avoir lieu dès maintenant, comme le réclame l'ensemble de la gauche, car elles risqueraient de compromettre la conclusion du plan de sauvetage.

Et, surtout, il n'a pas évoqué le remaniement ministériel voulu par le premier ministre, Pedro Passos Coelho, pour surmonter les divisions qui ont éclaté la semaine dernière au sein de son gouvernement à la suite de la démission de son partenaire de coalition et ministre des Affaires étrangères, Paulo Portas.

Le silence du chef de l'État sur ce point a été interprété comme un refus de l'accord censé assurer la survie de la majorité parlementaire formée par le Parti social-démocrate (PSD, centre-droit) de M. Passos Coelho et le CDS-PP, la formation conservatrice de M. Portas.

Reprise des négociations

Cet accord annoncé samedi prévoyait le maintien de M. Portas au gouvernement, promu au rang de vice-premier ministre responsable de la coordination économique et des relations avec la «troïka».

M. Cavaco Silva a reçu M. Passos Coelho jeudi en fin de journée «pour analyser la proposition d'un engagement de salut national», a fait savoir la présidence de la République.

Le premier ministre lui a alors fait part «de sa détermination à parvenir à un accord correspondant aux caractéristiques que le chef de l'État a énoncées mercredi», a indiqué le cabinet de M. Passos Coelho à l'agence de presse portugaise Lusa.

Le président a également reçu M. Portas puis le secrétaire général du Parti socialiste, Antonio José Seguro, qui a jusqu'ici appelé à la tenue d'élections et refusé d'intégrer un gouvernement qui ne soit pas issu des urnes.

La solution préconisée par le chef de l'État a donc provoqué surprise et scepticisme parmi les observateurs.

«Un président qui nous plonge dans le doute», titrait le quotidien Diario de Noticias dans son éditorial, tandis que son concurrent Publico concluait que le chef de l'État a «désavoué le premier ministre».

«Nous sommes devant un gouvernement fragilisé auquel le président n'accorde ni confiance ni crédibilité», a renchéri Antonio José Teixeira, directeur de la chaîne d'information Sic Noticias.

Le Portugal a plongé la semaine dernière dans la crise après la démission du ministre des Finances Vitor Gaspar, architecte des mesures d'austérité imposées par les créanciers du pays, suivie de celle du chef de la diplomatie, défenseur d'un allègement de la rigueur pour freiner la récession économique et la hausse de chômage.