Le président socialiste français François Hollande a tranché dans le vif en renvoyant mardi sa ministre de l'Écologie, Delphine Batho, qui contestait à voix haute une importante réduction des crédits de son ministère dans le projet de budget 2014.

Cette mini-crise, sur fond de rigueur budgétaire, met en difficulté les deux ministres écologistes du gouvernement socialiste, qui ont annoncé dans l'urgence une réunion mardi soir. L'une des deux, Cécile Duflot, avait soutenu Delphine Batho après sa déclaration-choc.

«C'est un mauvais budget», avait déclaré sur la radio RTL Mme Batho, 40 ans, enfreignant frontalement le principe de solidarité gouvernementale en vigueur en France.

Réputée pour son sérieux et sa discipline, Mme Batho réagissait à la baisse de 7 % de ses crédits prévue l'année prochaine. Son ministère de l'Écologie est ainsi l'un des plus sévèrement touchés par les économies que le gouvernement veut réaliser afin de contenir le déficit public à 3,5 % du PIB, contre 2,9 % initialement prévus, conformément aux attentes de Bruxelles.

Reconnaissant que «la situation budgétaire est extrêmement difficile», la ministre avait ajouté qu'il fallait «désormais se poser la question : l'écologie est-elle «bien une priorité»? «Est-ce qu'on a la capacité de passer du discours aux actes?».

«Le président de la République a mis fin aux fonctions de Mme Delphine Batho et a nommé M. Philippe Martin (NDLR: un député socialiste), ministre de l'Écologie, du développement durable et de l'énergie», a annoncé quelques heures plus tard la présidence de la République.

C'est la première fois depuis son élection en mai 2012 que le président François Hollande limoge l'un de ses 37 ministres. En mars, l'ex-ministre du Budget Jérôme Cahuzac, mis en cause par des médias, avait démissionné de lui-même, avant d'avouer quelques jours plus tard qu'il détenait un compte non déclaré à l'étranger, ce qui lui a valu une mise en examen (inculpation) pour blanchiment de fraude fiscale.

Les écologistes se réunissent

Le renvoi rapide de Delphine Batho ne marque pas forcément la fin de la crise politique ouverte en France sur fond de prévisions économiques pessimistes, alors que Bruxelles exige un retour du déficit public français à 3 % fin 2015.

Les deux ministres écologiques du gouvernement socialiste, Cécile Duflot (Logement) et Pascal Canfin (Développement) devaient se réunir mardi soir pour une «analyse politique de la situation» avec le responsable de leur parti EELV, Pascal Durand.

Avant l'annonce du renvoi de Mme Batho, sa collègue Cécile Duflot avait déclaré à l'AFP : «Je l'ai vue ce (mardi) matin, nous travaillons ensemble. Elle sait qu'elle peut compter sur mon soutien pour que le gouvernement traduise dans les faits la transition écologique».

Habituel aiguillon et trublion d'EELV (Europe Écologie - Les Verts), le député et ex-journaliste Noël Mamère a suggéré une vraie «réunion de crise» sur la participation des écologistes au gouvernement.

Le renvoi de Mme Batho intervient alors que dans le passé, des ministres avaient déjà pris ouvertement le contre-pied du gouvernement.

Responsable du Redressement industriel, Arnaud Montebourg, connu pour ses prises de position contre la mondialisation, avait reproché en privé au premier ministre de gérer la France comme un «conseil municipal». Des propos jamais démentis par Jean-Marc Ayrault. «Un outrage d'un ministre à son chef du gouvernement qui reste à l'heure actuelle sans conséquence», avait commenté le quotidien Le Monde.

Le premier ministre, dont le remplacement était encore évoqué il y a quelques mois, avait réussi à restaurer sa crédibilité ces dernières semaines. «Il n'y a plus de couacs (fausses notes)», se félicitait il y a quinze jours devant l'AFP l'un de ses ministres.