Arrivée en tête aux élections législatives en Islande, l'opposition de centre-droit s'apprête à mettre en place une coalition à la tête du pays près de quatre ans après en avoir été chassée suite à la faillite des banques.

Selon les résultats définitifs publiés dimanche, le Parti de l'indépendance (droite), avec 26,7% des voix, a devancé le Parti du progrès (centriste et agrarien), avec 24,3%.

Ils obtiennent chacun le même nombre de sièges, 19, ce qui les met en position de négocier une coalition de gouvernement. Ce serait un retour en grâce après les durs reproches essuyés pour leur responsabilité dans la faillite des banques islandaises en 2008.

Ce résultat sanctionne la coalition de gauche, au pouvoir depuis 2009, dont la politique de rigueur budgétaire a fini par lasser l'électorat.

Il devrait en outre enterrer la candidature de l'Islande à l'Union européenne, lancée en 2009, et à laquelle les deux partis étaient hostiles.

Même si les deux partis vainqueurs sont habitués à gouverner ensemble, les tractations pourraient prendre plusieurs jours.

Le Parti de l'indépendance et le Parti du progrès avaient conjointement présidé à la libéralisation du secteur financier dans les années 2000, qui avait débouché sur une hypertrophie puis une faillite des banques.

Cette fois-ci, ils promettent l'un des baisses d'impôt, l'autre une réduction du poids des emprunts immobiliers

Le poste de premier ministre a été revendiqué dans la nuit de samedi à dimanche par le conservateur Bjarni Benediktsson, 43 ans.

«Le Parti de l'indépendance est rappelé aux responsabilités», s'est-il félicité devant ses partisans. «La situation aujourd'hui appelle au changement», a-t-il martelé.

M. Benediktsson l'a répété lors d'un débat télévisé dimanche à la mi-journée. «Nous sommes prêts à prendre la tête du gouvernement», a-t-il dit, en tant que «parti ayant obtenu le plus de votes».

De son côté, le centriste Sigmundur David Gunnlaugsson, 38 ans, s'est dit prêt à collaborer avec lui. «Nous allons changer l'Islande pour le mieux très rapidement dans les mois et les années à venir», a-t-il lancé.

Quant au choix du premier ministre, il s'est montré plus circonspect. «Je laisserai le président décider», a-t-il déclaré.

La nomination du premier ministre revient au président de la République, qui désigne traditionnellement le chef de file du parti vainqueur.

Avocat de formation, reconverti dans les affaires, M. Benediktsson est parlementaire depuis 2003. Il a su à la fois incarner le changement et rassurer l'électorat traditionnel de son parti, conservateur et libéral.

Lui et M. Gunnlaugsson ont infligé une défaite cinglante aux deux partis de gouvernement. L'Alliance (sociaux-démocrates) perd plus de la moitié de sa représentation avec 9 députés (12,9% des voix), tandis que le Mouvement gauche-verts en a obtenu 7 (pour 10,9% des suffrages).

Dimanche, les vaincus ont contesté la légitimité de M. Benediktsson tout en s'en remettant à l'arbitrage du Président.

«Le président parlera à tous les dirigeants de partis, c'est la coutume», a déclaré le social-démocrate Arni Pall Arnasson

Deux partis novices complètent le Parlement. Avenir radieux (pro-UE) a remporté 6 sièges avec 8,2% des voix et le Parti pirate (libertaire) est le premier de son genre à entrer dans un Parlement national, avec 3 députés pour 5,1% des voix.

La campagne électorale a été dominée par la question de l'endettement des propriétaires immobiliers, problème auquel le centre-droit a promis de s'attaquer tout de suite.

«Les électeurs ont la mémoire courte», déplorait dimanche Anna Katrin Kristansdottir, électrice de 49 ans, à la sortie d'un bureau de vote de Reykjavik, qui n'a visiblement pas voté en faveur des vainqueurs.

D'après Stefania Oskarsdottir, professeur de sciences politiques à l'université d'Islande, ses compatriotes «attendent du changement et ils ne seront pas patients».

La nuit a été amère pour les membres de la coalition de gauche qu'avaient choisis les Islandais en pleine crise financière en 2009.

Le premier ministre Johanna Sigurdardottir, qui, à 70 ans, ne se représentait pas, s'est déclaré «très triste» face à la défaite.