Après un marathon de consultations, le président italien réélu Giorgio Napolitano désignera mercredi une personnalité chargée de former un gouvernement d'alliance entre grandes forces politiques pour mettre fin à deux mois de crise.

Après s'y être refusée pendant deux mois, la gauche semble prête désormais à s'allier avec son ennemi juré, Silvio Berlusconi.

Sans le dire expressément, Enrico Letta, numéro deux du Parti démocrate (centre gauche) a annoncé dans la soirée que son parti, première formation du pays à l'issue des élections de février, était désormais prêt à «concourir à la naissance d'un gouvernement dans la lignée de ce que le président» a souhaité.

Dans le discours d'investiture de son deuxième mandat, lundi, véritable réquisitoire contre la faillite de la classe politique, M. Napolitano avait recommandé une alliance entre grands partis, aucune force n'ayant une majorité suffisante pour gouverner seule.

M. Letta a annoncé que le chef de l'État ferait connaître son choix dans la journée de mercredi.

Selon tous les médias, l'ex-socialiste très modéré Giuliano Amato, deux fois chef du gouvernement, est le favori et a également les préférences de M. Napolitano.

Le nom de M. Letta est aussi cité, tandis qu'une partie du PD voudrait proposer le jeune maire de Florence Matteo Renzi, étoile montante du parti.

Le PD, a expliqué M. Letta devant la presse après que sa délégation eut été reçue par M. Napolitano, insiste sur deux axes programmatiques : d'abord «l'urgence économique et sociale», notamment pour «faire changer de ligne l'Union européenne» et favoriser la croissance.

Ensuite, «la réforme de la politique» avec une nouvelle loi électorale, la réduction du nombre des parlementaires, un Sénat aux pouvoirs redimensionnés, la suppression des provinces.

Le chef du petit parti de gauche SEL (Gauche, écologie et liberté), Nichi Vendola, rejette, a contrario, toute perspective de grande coalition ou d'alliance programmatique avec le centre droit de Silvio Berlusconi.

Pour sa part, la délégation du mouvement «Cinq étoiles» de l'ancien comique Beppe Grillo a annoncé une attitude d'«opposition responsable» au sein du Parlement, dans une déclaration au ton modéré.

Dans l'autre camp, Silvio Berlusconi, au nom du Peuple de la Liberté (PDL), a pleinement apporté son appui au plan du président pour un «gouvernement durable et stable, capable de prendre des mesures importantes».

«Nous attendons que le président nous dise qui il désigne, et nous chercherons à donner notre soutien le plus grand à celui-ci», a assuré le Cavaliere, visiblement satisfait de la perspective que son camp --et indirectement lui-même-- puisse être associé à la conduite des réformes.

Son ancien allié, Roberto Maroni, chef du parti régionaliste de la Ligue du Nord (droite), a en revanche confirmé qu'il resterait dans l'opposition, comme auparavant.

Toute la journée, le président âgé de 87 ans aura mené une série de rencontres rapides et harassantes, essentiellement pour vérifier si les positions des partis illustrées lors de précédentes consultations avaient éventuellement subi des modifications.

Dans l'après-midi, le secrétaire du PD, Pier Luigi Bersani, qui n'a pas réussi à souder ses troupes pour l'élection d'un président de la République, a confirmé sa démission devant son état-major.

Tout en reconnaissant sa part de responsabilité dans les divisions internes, il a assuré que son parti demeurerait «une histoire à succès» dans l'avenir.

Lundi, tançant vertement tous les élus, M. Napolitano avait appelé dans un discours musclé à une large entente pour diriger le pays : «sur la base des résultats électoraux, qu'ils plaisent ou non, il n'y a pas de parti ou coalition» qui puisse gouverner «avec seulement ses propres forces», avait souligné avec insistance le président réélu.

La gauche italienne, qui a remporté la majorité des sièges à la chambre des députés, mais pas au Sénat, s'était systématiquement opposée jusqu'à lundi à une entente avec la droite de Berlusconi pour former un gouvernement, soutenant que sa base électorale y était opposée.

Selon l'Osservatore Romano, le quotidien du Vatican, le Parti démocrate paie aujourd'hui le fait d'être «replié sur sa seule identité anti-berlusconienne».