Le président italien sortant Giorgio Napolitano, 87 ans, appelé à la rescousse par un Parlement dans l'impasse, a été réélu samedi, provoquant la fureur du contestataire Beppe Grillo qui a crié au «coup d'État» et appelé à une «mobilisation populaire».

Dans sa première réaction publique après sa réélection, M. Napolitano a souligné «la situation difficile» du pays et indiqué qu'il préciserait ses intentions au cours de sa prestation de serment et dans son discours au Parlement lundi à 15 h GMT.

La réélection, une première dans l'histoire italienne, à une très large majorité de cet ancien communiste qui fêtera ses 88 ans en juin, a été accueillie par une longue ovation debout de la majorité des «grands électeurs».

«Aujourd'hui est une journée importante pour notre République. Je remercie le président Giorgio Napolitano pour son sens du devoir et sa générosité personnelle et politique qui lui a fait accepter de poursuivre son engagement dans un contexte aussi difficile et incertain», a aussitôt réagi le chef de la droite Silvio Berlusconi.

Son successeur à la tête du gouvernement, Mario Monti, a lui aussi remercié M. Napolitano pour son «esprit de sacrifice».

Le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, a félicité M. Napolitano pour sa réélection qui intervient à «un moment décisif pour le processus d'intégration» européen.

À l'opposé, l'ex-humoriste Beppe Grillo, chef du Mouvement cinq étoiles (M5S), a estimé que les dirigeants des partis politiques traditionnels étaient «prêts à tout pour empêcher le changement». «Ils sont désespérés. Un coup d'État est en cours», a-t-il écrit sur son blogue pendant que ses partisans, rassemblés devant la Chambre des députés à Rome, criaient «Bouffons, bouffons!», «Honte!», tout en scandant le nom de leur candidat, le constitutionnaliste Stefano Rodota.

Ce dernier s'est toutefois dissocié de ces manifestations, soulignant «être opposé à une quelconque marche sur Rome». Il a même adressé «un salut au président réélu».

M. Napolitano, qui n'avait cessé de répéter son souhait de ne pas se présenter en raison de son âge avancé et aussi de la volonté de changement exprimée par les électeurs, a finalement cédé à la pression des responsables politiques, incapables de lui trouver un successeur après cinq tours de scrutin.

«Je considère qu'il est de mon devoir d'offrir la disponibilité qui m'a été demandée», avait expliqué Giorgio Napolitano, figure respectée de la scène politique italienne.

Dans la matinée, de Pier Luigi Bersani (gauche) à Silvio Berlusconi (droite) en passant par le chef du gouvernement sortant Mario Monti, tous étaient venus  l'exhorter à se représenter.

Car l'Italie, troisième économie de la zone euro, n'a cessé de s'enfoncer dans la crise politique depuis les élections législatives de fin février qui n'ont dégagé aucune majorité claire.

Cette fois-ci, «les rencontres ont permis de faire émerger une large convergence» des forces politiques en faveur de M. Napolitano, a souligné M. Bersani, chef du Parti démocrate (PD).

Ce dernier n'avait pas réussi aux précédents scrutins à faire élire ses propres candidats, dont l'ex-président de la Commission européenne, Romano Prodi, à qui il a manqué une centaine de voix de son propre camp.

Cet échec cinglant a entraîné un véritable séisme au sein de la gauche.

M. Bersani a annoncé sa démission, de même que la présidente du PD, Rosy Bindi, tandis que M. Prodi retirait sa candidature face à la trahison des membres de son propre parti.

La tâche du président est lourde. Les élections législatives de fin février ont débouché sur une équation insoluble avec la gauche qui a la majorité absolue à la Chambre des députés mais pas au Sénat, divisé en trois blocs de forces qui se neutralisent mutuellement : la gauche, la droite berlusconienne et le M5S.

Cette situation contraint le pays à aller de l'avant avec un gouvernement démissionnaire depuis quatre mois.