La dépouille de Margaret Thatcher devait reposer mardi dans une chapelle du Palais de Westminster, pour une cérémonie privée à la veille de funérailles quasi nationales et sous haute surveillance, dans la crainte d'ultimes manifestations d'opposants à la «Dame de fer».

Le cercueil - qui avait quitté la semaine dernière, pour une destination gardée secrète, l'hôtel Ritz où est décédé l'ancienne première ministre britannique le 8 avril à l'âge de 87 ans - est attendu mardi après-midi à Westminster, haut lieu de la vie politique au Royaume-Uni.

Une centaine de personnes triées sur le volet - des membres de la famille, quelques députés et Lords - assisteront à un office religieux célébré à 16 h (11 h à Montréal) dans la petite chapelle St Mary Undercroft du XIIIe siècle.

Après cette brève cérémonie religieuse, tous les membres du Parlement sont invités à se recueillir dans la chapelle de style gothique, convertie un temps en cave à vins, en écurie et plus récemment en cuisine. Toute la nuit, l'aumônier de la chambre basse du Parlement, le révérend Rose Hudsin-Wilkin, veillera sur le cercueil, avant le début de la procession mercredi matin.

Mme Thatcher, première femme chef de gouvernement au Royaume-Uni, premier ministre britannique du XXe siècle au mandat le plus long (1979-1990), mais aussi figure politique hautement controversée, aura droit à des obsèques cérémonielles dignes des adieux à la princesse Diana. Mais un cran en-dessous d'obsèques nationales, un honneur réservé aux monarques et «personnes exceptionnellement éminentes», telles l'ex-premier ministre Winston Churchill, victorieux des nazis.

Sept cents militaires seront déployés le long du parcours entre le palais de Westminster et la cathédrale Saint-Paul, pour saluer le cercueil drapé dans l'Union Jack. Dix-neuf coups de canon seront tirés depuis la Tour de Londres. Et fait rarissime, les cloches de Big Ben ne sonneront pas le temps de la cérémonie, comme pour les obsèques en 1965 de Churchill. Les enfants de Mme Thatcher, Mark et Carole, ont salué ce geste symbolique, qui représente un «immense honneur».

Plus de 2000 invités - beaucoup de politiques, mais aussi quelques vedettes du show-business des années 80 - sont attendus à la cérémonie religieuse à Saint-Paul. Parmi eux, de nombreux dignitaires venus du monde entier, dont le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et le président du Conseil italien Mario Monti, ainsi que des personnalités comme l'actrice Joan Collins.

Mais les quatre anciens présidents américains conviés ont tous décliné l'invitation, tout comme d'autres grands acteurs de la scène internationale des années 80, le Russe Mikhaïl Gorbatchev et l'Allemand Helmut Kohl étant excusés pour raison de santé.

En revanche, la reine Élisabeth II, qui entretenait des relations compliquées avec Mme Thatcher, assistera aux obsèques. Une première là encore depuis les funérailles de Churchill. Les membres de l'actuel gouvernement britannique et tous les anciens premiers ministres du pays seront aussi présents, en «jaquette ou en costume noir», comme le stipule le carton d'invitation.

Les obsèques se dérouleront sous très haute sécurité, la police craignant qu'elles n'offrent une dernière occasion de s'exprimer pour les opposants, très nombreux, à la «Dame de fer». Mardi, des barrières de sécurité étaient disposées le long des 1,9 km du parcours. Les commerçants étaient appelés à retirer poubelles, échelles et autres objets susceptibles d'être transformés en projectiles.

Des engins de nettoyage doivent sillonner la ville pour nettoyer les rues à coups de détergent, au cas où des manifestants jetteraient du lait sur la chaussée, a rapporté le Times. Un acte symbolique en référence à la suppression de la distribution gratuite de lait dans les écoles, qui avait valu à Mme Thatcher le surnom de «voleuse de lait».

Des manifestants comptent tourner leur dos au passage du cercueil pour protester contre le coût d'«obsèques grotesques financées par l'État». Elles sont estimées à une dizaine de millions de livres selon la presse. Un comble selon les détracteurs de l'ultra-libérale Thatcher.

Des Britanniques sont encore «blessés et en colère» contre la politique de Mme Thatcher, «encore très controversée» 23 ans après avoir quitté le pouvoir, a constaté le révérend David Ison, chargé d'accueillir les fidèles mercredi.

Sur le plan politique, Mme Thatcher devrait encore enflammer les débats au parlement mardi soir : des députés de l'opposition travailliste y défendront une motion s'opposant à l'annulation, mercredi, des questions au gouvernement, pour permettre aux ministres d'assister aux obsèques.