Les mensonges d'un ex-ministre qui reconnaît avoir voulu se soustraire au fisc placent le président français et le gouvernement sur la défensive. Retour, en trois temps, sur la pire crise politique vécue par François Hollande.

1. Le déni

En décembre 2012, le site d'information Mediapart frappe un grand coup en accusant le ministre du Budget, Jérôme Cahuzac, d'avoir détenu pendant de longues années un compte non déclaré en Suisse. Ses journalistes assurent que le compte en question a été fermé au début de 2010 et les «avoirs cachés», transférés à Singapour.

Le politicien de 60 ans n'apprécie pas, et pour cause. Cet ancien chirurgien de formation est chargé notamment de lutter contre l'évasion fiscale et joue un rôle central dans les efforts de redressement budgétaire du gouvernement. Il multiplie les démentis et invite «avec force» les médias à ne pas relayer les allégations «délirantes» formulées à son encontre. Il répète plusieurs fois, en public et en privé, qu'il n'a «jamais eu» de compte à l'étranger.

2. L'aveu

Les dénégations du ministre, qui reçoit dans un premier temps le soutien du gouvernement et du chef de l'État, François Hollande, commencent rapidement à prendre l'eau. Mediapart, qui l'évoquait dans son article, rend public un enregistrement dans lequel un homme présenté comme Jérôme Cahuzac évoque, avec irritation, l'existence d'un compte chez UBS en relevant que «ce n'est pas la plus planquée des banques». Une enquête pour «blanchiment de fraude fiscale» est ouverte et débouche sur une demande d'assistance à la Suisse. Le ministre continue de plaider son innocence, même après avoir annoncé sa démission à la mi-mars.

Deux semaines plus tard, il change son discours du tout au tout, après que ses avocats eurent pris connaissance d'informations judiciaires confirmant l'existence du compte. «J'ai été pris dans une spirale de mensonge et je m'y suis fourvoyé», résume-t-il.

3. La bombe

Le revirement de l'ancien ministre du Budget, qui a confirmé mardi l'existence du compte devant les juges responsables du dossier, marque sa mort politique. Il déclenche du même coup une véritable tempête. Les mensonges répétés du politicien embarrassent la gauche et le président, qui s'est efforcé hier de se distancer de l'ex-ministre en dénonçant son comportement comme une «faute impardonnable». Il a annoncé du même souffle une série de mesures pour assurer une plus grande indépendance de la justice et éviter les conflits d'intérêts chez les élus. De la poudre aux yeux pour l'opposition, qui réclame une commission d'enquête pour savoir si Jérôme Cahuzac a été protégé par les membres de l'exécutif.

La polémique survient dans le contexte où les dirigeants socialistes, au plus bas dans les sondages, peinent à trouver des réponses à la crise économique qui frappe le pays.