La promesse-choc du président français François Hollande, qui visait à taxer à 75% les revenus supérieurs à 1 million d'euros (1,3 million de dollars), devient un cauchemar pour le dirigeant socialiste.

Le projet, qui avait eu l'effet d'une bombe lors de la campagne présidentielle de 2012, risque de tourner court en raison de la multiplication d'embûches juridiques.

La plus récente est venue il y a quelques jours du Conseil d'État français. La plus haute juridiction administrative du pays, saisie par le ministre de l'Économie, presse le gouvernement de revoir sa copie pour plafonner à 66% la ponction fiscale sur les revenus élevés, de manière à éviter qu'elle soit considérée comme «confiscatoire».

Selon une analyse réalisée par le quotidien Le Monde, le taux de taxation sur les revenus de travail supérieurs à 1 million d'euros ne pourra conséquemment être rehaussé que de quatre points de pourcentage par rapport à la situation actuelle.

Les revenus devant découler du taux majoré, qui doit normalement être maintenu pour une période de deux ans, seront du coup réduits. Il était déjà prévu qu'il permettrait de générer quelques centaines de millions de dollars, une somme jugée dérisoire par nombre d'analystes par rapport à la taille du déficit français.

L'avis du Conseil d'État fait suite à une décision critique du Conseil constitutionnel, qui avait censuré une première fois le projet fiscal du gouvernement en décembre, en évoquant des questions techniques.

L'opposition jubile

La droite française, qui avait accueilli le projet de taxation à 75% comme une hérésie, a salué l'avis du Conseil d'État. L'ex-ministre Laurent Wauquiez a souligné que toute l'affaire avait fait «beaucoup de bruit pour rien» et visait à détourner l'attention des ponctions imposées à l'ensemble de la population.

Quelques voix se sont aussi élevées à gauche pour réclamer l'abandon du projet. Le député socialiste Jean-Marie Le Guen a déclaré qu'il n'était pas nécessaire, puisque la France est aujourd'hui l'un des pays «les plus redistributeurs» sur le plan fiscal.

La chroniqueuse Françoise Fressoz souligne que François Hollande a fait un bon coup politiquement avec l'annonce de la taxe à 75%, parce qu'elle lui a permis, en campagne, de neutraliser l'extrême gauche tout en présentant son adversaire, Nicolas Sarkozy, comme le président «des riches».

Cette mesure «symbolique» est cependant devenue aujourd'hui un «boulet» qui a sensiblement nui, selon elle, à l'image de la France à l'étranger. L'exil très commenté de l'acteur Gérard Depardieu, qui a ouvertement attaqué le gouvernement, a notamment généré une énorme attention.

Une image ternie

Les derniers démêlés fiscaux du président français surviennent au moment où sa cote de popularité continue de chuter. Selon un sondage de l'institut LH2 paru il y a quelques jours, seulement 36% des Français ont une opinion favorable du chef d'État.

Il doit accorder demain une longue entrevue à la chaîne France 2, à une heure de grande écoute, dans l'espoir de rallier la population. Une porte-parole socialiste a assuré qu'il donnera alors l'image d'un «chef déterminé qui veut entraîner ses concitoyens dans le projet de redressement national commencé il y a 10 mois».

Le politicien fera face à des questions sur la politique fiscale du gouvernement, qui étudie «l'ensemble des options techniques envisageables» avant de mettre la dernière main à sa position sur la fameuse taxe.