Les Tchèques votaient vendredi et samedi pour élire le successeur du président eurosceptique Vaclav Klaus, choisissant dans un scrutin serré entre le vétéran de gauche Milos Zeman et l'aristocrate de droite Karel Schwarzenberg.

Les bureaux de vote ont fermé vendredi à 16 h pour rouvrir samedi entre 2 h et 8 h (heure du Québec). Le nom du nouveau chef de l'État devrait être connu samedi après-midi, selon l'office des statistiques (CSU).

Les deux prétendants sont sortis au coude à coude du premier tour il y a quinze jours, avec 24,21 % pour M. Zeman, premier ministre en 1998-2002, et 23,4 % pour M. Schwarzenberg, chef de la diplomatie et vice-premier ministre du gouvernement de Petr Necas.

Selon les estimations des médias, le taux de participation pourrait être proche de celui du premier tour (61,31 %).

M. Schwarzenberg, 75 ans, a voté à Sykorice, près de Prague, entouré d'une cohorte de photographes et de cameramen. «Le résultat sera très serré. Je ne suis pas nerveux, loin de là», a-t-il indiqué.

Par inadvertance et aveuglé par les flashes selon ses dires, il a omis de mettre son bulletin dans l'enveloppe, rendant son vote non valide. Il serait «idiot» de perdre cette élection d'une seule voix, a-t-il commenté en souriant.

Milos Zeman, 68 ans, a voté à Prague accompagné de son épouse et de sa fille, et s'est borné à déclarer : «j'ai déjà dit ce que je voulais dire et maintenant, c'est le tour des citoyens».

Quel que soit le nom du nouveau locataire du Château de Prague, les Tchèques choisiront un pro-Européen et tourneront la page du très eurosceptique Vaclav Klaus, 71 ans. Il achève le 7 mars son deuxième mandat de cinq ans.

La campagne électorale a été ponctuée de tensions et d'invectives personnelles, notamment à propos de la question sensible des décrets Benes du nom de l'ancien président tchécoslovaque Edvard Benes qui les a signés après la Seconde Guerre mondiale.

Par ces textes, quelque trois millions d'Allemands et d'Autrichiens des Sudètes ont été dépossédés de leurs biens et expulsés de Tchécoslovaquie.

«Ce qu'on a fait en 1945 serait aujourd'hui condamné comme une violation grossière des droits de l'Homme et le président Benes serait convoqué à La Haye» (siège de la Cour internationale de justice, ndlr), a déclaré M. Schwarzenberg au cours d'un débat télévisé, s'attirant les foudres de ses adversaires.

Vendredi, le quotidien populaire Blesk a jeté de l'huile sur le feu avec une publicité sur toute une page, accusant M. Schwarzenberg, qui avait vécu en exil en 1948-1989, d'agir en faveur des Allemands des Sudètes.

«C'est un mensonge! Une saleté!», s'est exclamé M. Schwarzenberg au cours d'un point de presse. Ses collaborateurs ont annoncé qu'ils allaient attaquer en justice les auteurs de cette publicité, commandée par un ancien officier de l'ex-police politique communiste StB, selon la presse pragoise.

Les médias ont aussi épinglé M. Zeman pour certaines de ses récentes déclarations qui, selon eux, ne correspondaient pas à la vérité.

Le premier ministre Necas a stigmatisé vendredi une «campagne hystérique» qui a «divisé la société».

Cette présidentielle se déroule sur fond de morosité générale, provoquée par la récession économique et un taux de chômage de 9,4 %.

S'ils ont une position similaire à l'égard de l'UE, que la République tchèque, pays de 10,5 millions d'habitants, a rejointe en 2004, les deux candidats à la présidence s'opposent à mains égards : M. Zeman, économiste de gauche, est connu pour des propos musclés et souvent accusé de populisme, alors que M. Schwarzenberg, issu d'une vieille lignée princière, est un grand partisan des droits de l'Homme et des valeurs traditionnelles.

Ce dernier, farouche anticommuniste, est un admirateur de Vaclav Havel (1936-2011), icône de la «Révolution de velours» et président de 1989 à 2003.

Milos Zeman, membre du parti communiste entre 1968 et 1970, est soutenu par M. Klaus, ancien économiste pragmatique et rival politique de M. Havel.

Humaniste et conservateur, M. Schwarzenberg bénéficie d'un fort soutien à Prague et dans d'autres grandes villes. Il est aussi le favori des milieux artistiques et des jeunes citadins.

M. Zeman gagne des points auprès de l'électorat de gauche et en province, frappée par la restructuration économique. Il a sollicité le soutien du parti communiste.