Le principal rival d'Angela Merkel aux législatives allemandes de 2013, le social-démocrate Peer Steinbrück, s'est lancé dimanche dans la bataille en plaçant l'égalité et la justice sociale au coeur de sa campagne.

«Liberté, équité sociale, solidarité: ces valeurs resteront notre ligne directrice», a lancé M. Steinbrück, devant les quelque 600 délégués réunis à Hanovre (nord), cinq jours après le sacre triomphal dans cette même ville de Mme Merkel, reconduite avec 98% des voix à la tête de l'Union chrétienne-démocrate (CDU).

«Au nom de ces valeurs, je suis candidat pour être chancelier de la République fédérale d'Allemagne», a-t-il lancé, un pari qu'il n'a, selon les sondages, pas grande chance de gagner.

Dans un discours d'une heure et 48 minutes intitulé «diriger l'Allemagne mieux et plus équitablement», l'ex-ministre des Finances de Mme Merkel (2005 - 2009) a décliné son combat pour notamment un salaire minimum légal, une meilleure offre pour les gardes d'enfants, des logements moins chers.

Il a attaqué la CDU, qui selon lui n'aurait d'autre programme électoral que la personne de la chancelière, dont les slogans politiques sont «comme des étiquettes sur des bouteilles vides».

«Mme Merkel dit qu'elle dirige le meilleur (...) gouvernement depuis la Réunification (en 1990). J'ai rarement autant ri», a-t-il lancé en déclenchant un tonnerre d'applaudissements.

Il a aussi accusé la chancelière d'«avoir isolé» le pays. «Toutes les discussions que j'ai menées ces dernières semaines avec les chefs de gouvernement et de l'opposition» de différents pays d'Europe «m'ont confirmé que l'Allemagne s'est éloignée de sa maxime: "être un peuple de bons voisins"», a-t-il lancé.

Depuis quelques semaines, le SPD, qui a soutenu tous les plans de sauvetage contre la crise de l'euro proposés par Mme Merkel au parlement, tente de se démarquer de sa politique européenne, insistant sur l'importance de relancer la croissance, pour ne pas étouffer les pays du sud forcés à l'austérité à tout crin.

Et de nouveau, M. Steinbrück a accusé Mme Merkel de récolter les fruits des réformes engagées par les sociaux-démocrates pour flexibiliser le marché du travail sous Gerhard Schröder, venu le soutenir à Hanovre aux côtés de son mentor, Helmut Schmidt.

Il a clairement promis qu'il ne participerait pas de nouveau à un gouvernement sous la houlette de Mme Merkel. «Je ne suis pas disposé à entrer dans un gouvernement de grande coalition», a-t-il martelé. Le nouveau gouvernement, «c'est clairement rouge-vert!», a-t-il lancé, à l'attention des écologistes.

Les délégués, qui ont ovationné M. Steinbrück après son discours pendant dix minutes, ont approuvé sa nomination à 93,45%, un score relativement modeste dans l'histoire du parti.

Malgré les mauvais sondages, M. Steinbrück, un économiste de formation âgé de 65 ans, croit en ses chances de battre celle que de nombreux Allemands considèrent comme la «tsarine de l'Europe», une dirigeante au faîte de sa popularité dans son pays après sept ans de pouvoir, lors des élections prévues pour le 22 septembre.

Selon un sondage paru dans le journal dominical Bild am Sonntag, 41% des Allemands jugent le social-démocrate de 65 ans capable d'être chancelier, tandis que 52% ne lui font pas confiance pour assurer cette fonction.

Depuis qu'il a été choisi comme candidat par les instances du SPD il y a près de trois mois, Peer Steinbrück, dont l'humour caustique et le franc-parler devaient pimenter la campagne, ne parvient pas à se dépêtrer d'une polémique sur des conférences rémunérées qui lui ont rapporté 1,25 million d'euros en trois ans.

«Mes honoraires étaient de lourds pavés que j'ai emportés dans mes bagages et que je vous ai fait porter sur vos épaules», a-t-il dit, reconnaissant ses faiblesses et remerciant les militants de l'avoir soutenu.

Décidé à se présenter comme le visage de la modernité, il a lancé samedi soir son compte Twitter sur lequel il compte gazouiller mercredi pendant une heure avec les électeurs. La chancelière n'en a pas.

Le Parti socialiste français a réagi dans la soirée en apportant son «plein soutien» à M. Steinbrück, estimant «nécessaire que la gauche européenne apporte des réponses communes face à la crise», selon un communiqué de son premier secrétaire, Harlem Désir.