Un peu plus d'un mois après avoir annoncé qu'il ne se représenterait pas pour prendre la tête du gouvernement italien, Silvio Berlusconi a fait volte-face samedi en annonçant son retour dans l'arène politique avec la ferme intention de «vaincre», un an après avoir dû céder les rênes du pays au gouvernement technique de Mario Monti.

«J'entre en scène pour gagner», a assuré le Cavaliere, 76 ans, lors d'une déclaration improvisée à quelques journalistes italiens à l'entrée du centre d'entraînement du Milan AC, son club de football.

M. Berlusconi a mis fin à l'incertitude qu'il entretenait depuis un mois, quelques jours après que son parti, à la surprise générale, se fut abstenu à deux reprises sur des projets de loi du gouvernement de Mario Monti.

«Je suis assailli de demandes des miens pour revenir au premier plan», avait expliqué mercredi M. Berlusconi en affirmant vouloir sauver une «Italie au bord du précipice», minée par le chômage et l'alourdissement de la fiscalité.

Il marquait ainsi la fin du soutien que son camp apportait depuis un an au gouvernement de techniciens de Mario Monti, dans une alliance obligée et inédite avec le centre-gauche.

«Nous avons fait preuve d'une grande responsabilité et, pendant un an, nous avons soutenu ce gouvernement en cherchant à corriger les mesures qui ne nous convainquaient pas. Mais aussi en affirmant toujours qu'une politique d'austérité sur une économie qui ne croît pas provoque des dommages», a-t-il expliqué.

«Tous les chiffres sont moins bons qu'il y a un an», a assuré M. Berlusconi, tout en ajoutant que son parti voterait les textes en cours d'examen au Parlement, à commencer par la loi budgétaire, jusqu'à la fin de la législature au printemps prochain.

Son parti, le PDL (Peuple de la liberté) est au bord de la scission entre modérés et aile droite. Un récent sondage de l'Institut SWG le crédite de moins de 14 % (13,8 %) au prochain scrutin national alors qu'il avait triomphalement remporté celui de 2008 avec 38 %.

M. Berlusconi a annoncé une réunion dimanche du PDL, ainsi que des contacts avec son ex-allié populiste, la Ligue du Nord, en espérant «parvenir à une décision qui puisse nous permettre de voter ensemble pour le même candidat».

Dans la même déclaration improvisée au Milan AC, le Cavaliere a encore rejeté les critiques du chef du centre gauche, Pierluigi Bersani, qui l'avait traité d'«irresponsable».

«Bersani a déjà commencé la campagne électorale», a-t-il relevé. M. Bersani a été choisi la semaine dernière comme candidat à l'issue de primaires au sein du Parti démocrate (PD) et les sondages le donnent le vent en poupe.

Les primaires au PD avaient été bien perçues en Italie et à l'étranger, les observateurs faisant la comparaison entre un centre gauche enfin recomposé et un centre droit en pleine déconfiture.

Fin octobre encore, le milliardaire et chef de l'empire télévisuel Mediaset, l'air fatigué et tendu par ses condamnations en justice, avait annoncé qu'il renonçait à se présenter au poste de chef du gouvernement.

Mais, au centre droit, aucune personnalité d'envergure ne se détachait. «Il fallait un leader comme un Berlusconi en 1994 mais nous ne l'avons pas trouvé», a-t-il expliqué dans son allusion à sa première entrée en politique.

M. Berlusconi a annoncé vouloir présenter aux élections de «nombreux visages nouveaux», affirmant avoir déjà pris de nombreux contacts dans le monde de l'entreprise, du sport et de l'université.

Le comique Beppe Grillo, chef du mouvement anti-partis «Cinq Stelle» («Cinq étoiles»)lui a répliqué sur son blogue: «encore toi! Mais nous ne devions plus nous revoir!»

Son ancien allié de droite, Gianfranco Fini, a souligné qu'«on ne peut plus continuer avec le populisme et la démogagie, à créer des illusions et écouler de la fausse monnaie».

Quant au leader du parti centriste UDC Pier Ferdinando Casini, il a noté que «les Italiens se sacrifient depuis un an pour éviter un gouffre à la grecque, et voilà Berlusconi qui veut nous reporter cinq ans en arrière», alors que Mario Monti a «redonné un minimum de crédibilité à l'Italie».

En marge d'une soirée à La Scala, vendredi, le président du Conseil avait relevé que «le Roi Soleil s'était un peu éloigné» de lui. Il devait rencontrer dans la soirée le président Giorgio Napolitano.

Interrogé avant l'annonce de Bersluconi, M. Monti qui participait samedi à une conférence à Cannes, a dénoncé «les populismes et les promesses illusoires» dans la vie politique italienne.

En octobre 2011, en pleine crise des marchés européens, le Cavaliere avait dû s'effacer pour permettre au gouvernement de techniciens de Mario Monti de parer aux menaces financières contre l'Italie.

Vendredi déjà, les marchés se montraient nerveux, avec une remontée du différentiel des taux obligataires italiens avec ceux de l'Allemagne à 330 points (moins de 300 lundi) et une Bourse de Milan lanterne rouge en Europe (autour de -1 %).