Un pilote américain et l'officier serbe qui a abattu son avion durant les frappes de l'OTAN contre la Serbie en 1999 ont à peine contenu leurs larmes en se retrouvant à Belgrade, qui attend mardi la visite de Hillary Clinton dont le message portera justement sur la réconciliation dans les Balkans.

Dale Zelko, ex-pilote de l'US Air Force dont l'avion furtif F-117 a été abattu par l'ex-officier de l'armée serbe, Zoltan Dani le 27 mars 1999, s'est rendu à Belgrade pour la sortie lundi soir du documentaire Second Meeting, qui raconte l'histoire des deux ennemis devenus de très proches amis après la guerre.

«Je suis désolé pour votre souffrance, pour la douleur, les pertes et l'angoisse. Je suis désolé pour la guerre», a lâché devant le public Dale Zelko, d'une voix tremblante après la projection.

Les larmes aux yeux, il a ajouté être «si reconnaissant de pouvoir être aux côtés de la famille de Zoltan Dani» à cette occasion.

«Une guerre n'est pas menée par des gens normaux, ordinaires, mais par des gouvernements. Les politiciens sont les seuls qui décident», a-t-il lancé, longuement applaudi dans une salle de cinéma pleine à craquer.

Au courant de la visite de Mme Clinton, M. Zelko a déclaré que son message était de «ne plus jamais refaire cela».

«Il faut faire tout ce qui est possible pour régler tout problème ou différend dans le respect et l'admiration mutuels», a-t-il dit à l'AFP.

La chute du F-117, abattu à Budjanovci, près de Belgrade, par une batterie de missiles antiaériens commandée par Zoltan Dani s'était produite pendant la campagne de bombardements de 78 jours visant à faire cesser la répression du régime alors au pouvoir à Belgrade contre le Kosovo, qui réclamait son indépendance.

Il s'agit du seul cas connu d'un F-117 abattu au combat. Les jeunes de Serbie, dont l'armée s'est révélée impuissante devant la force de l'Alliance, avaient aussitôt répondu par la moquerie en portant des T-shirts frappés d'une photo de l'avion et du message «Désolé, j'ignorais qu'il était invisible».

Le pilote américain avait été secouru par un hélicoptère de l'OTAN et avait été transporté vers une base de l'Alliance en Italie, avant de regagner les Etats-Unis.

«Cette mission avait été mon dernier combat. Je n'ai plus jamais piloté l'avion depuis», a confié Dale Zelko.

Son ancien ennemi a aussi abandonné l'armée pour ouvrir une boulangerie. Il dit avoir rencontré l'ancien pilote par l'intermédiaire du réalisateur du documentaire, Zeljko Mirkovic.

«Zeljko m'avait demandé ce que je dirais à l'homme dont j'ai abattu l'avion. Je lui ai répondu que je l'inviterais à prendre un verre parce que lui aussi, comme moi, ne faisait que son travail», avait déclaré M. Dani auparavant.

Les familles de deux hommes sont devenues amies, avec des liens particuliers entre leurs enfants.

«La guerre n'était pas entre lui et moi, ce n'était pas une chose personnelle, et encore moins entre moi et le peuple serbe», assure aujourd'hui le pilote américain.

Le documentaire qui a déjà été diffusé à New York et Washington fera le tour de plusieurs villes de Serbie cette semaine.

Mme Clinton doit arriver mardi à Belgrade, avant d'aller au Kosovo, dont l'indépendance de la Serbie, proclamée unilatéralement en 2008 par la majorité albanaise de ce territoire, a été soutenue par Washington et est fermement rejetée par la Serbie.

Mme Clinton va appeler mardi la Serbie et le Kosovo à reprendre leur dialogue, entamé en 2011 sous la houlette de Bruxelles, afin de se rapprocher d'une future intégration dans l'Union européenne.

Le Kosovo a été reconnu à ce jour par quelque 90 pays, dont 22 des 27 États membre de l'UE et les États-Unis.