L'influence et la visibilité en France de l'islam sont jugées « trop importantes » par 60 % de Français, 43 % voyant la communauté musulmane comme une « menace » pour l'identité du pays, selon un sondage paru jeudi et jugé « préoccupant » par certains sociologues.

Ce sondage de l'institut IFOP pour le quotidien Le Figaro, qui reprend notamment des questions posées depuis 1989 aux Français, montre une nette dégradation ces dernières années de l'image de la deuxième religion de France après le catholicisme.

Si 43 % des personnes sondées affirment que la présence d'une communauté musulmane en France est « plutôt une menace » pour l'identité de la France, 40 % n'y voient aucun danger et 17 % la considèrent plutôt comme un facteur d'enrichissement culturel.

Concrètement, 43 % des personnes interrogées sont opposées à l'édification de mosquées (22 % en 2001), 63 % au port du voile dans la rue (32 % en 2003) et 45 % se disent « hostiles » à l'élection d'un maire de confession musulmane dans leur commune (35 % en 2001). 67 % (contre 33 %) des Français considèrent aussi que les musulmans et les personnes d'origine musulmane ne sont pas bien intégrés dans la société française. Ils sont 68 % à estimer que cette mauvaise intégration vient du refus des musulmans de s'intégrer et 52 % à l'attribuer à de « trop fortes différences culturelles ».

Pour Le Figaro, journal conservateur, « tout se passe comme si les marqueurs du communautarisme étaient devenus insupportables aux Français ».

Jugeant les musulmans responsables de leur mauvaise image, le Front national (FN, extrême droite) a exhorté dans un communiqué « l'islam à s'adapter à la République » et les musulmans à « s'assimiler ».

Le Conseil représentatif du culte musulman (CFCM) a dénoncé pour sa part le traitement politique et médiatique de l'islam. « Les Français ne connaissent l'islam qu'à travers l'actualité, qui se concentre sur les faits négatifs comme l'arrestation de radicaux », a déclaré le président du CFCM, Mohammed Moussaoui.

« Le plus grave dans ce sondage, ce sont les 68 % de Français qui considèrent que c'est la faute des musulmans s'ils sont mal intégrés », a commenté pour l'AFP Raphaël Liogier, sociologue.

Ils étaient 61 % à le penser il y a deux ans. « Ça veut dire que la paranoïa face à l'islam augmente », selon le sociologue. « En disant cela, les Français supposent une intention maligne et négligent les facteurs économiques et sociaux ». « On est dans la définition clinique de la paranoïa : on a peur de choses que l'on ne voit même plus, que l'on suppose exister », a-t-il dit.

« C'est très dangereux », car cela peut entraîner des personnes fragiles à se prendre pour des « héros isolés » de la « civilisation européenne » et à verser dans la violence, dit-il, en jugeant possible l'émergence en France d'un tueur comme Anders Behring Breivik, qui a assassiné 77 personnes en Norvège, le 22 juillet 2011, au nom de la lutte contre le multiculturalisme.

Le sondage a été réalisé auprès de 1736 personnes représentatives de la population française âgée de 18 ans et plus, entre le 15 et le 18 octobre.